Les défis de l’Internet des objets | CNRS Le journal

Les défis de l’Internet des objets 27.09.2016, par Martin Koppe MIMI POTTER/FOTOLIA.COM Partager Smartphones, drones, capteurs de température ou de mouvement… D’ici à 2020, 50 milliards d’appareils seront connectés à un vaste réseau : l’Internet des objets. Mais les scientifiques ont encore de nombreux défis à relever, allant de l’autonomie énergétique des capteurs à la sécurité des données.

Source : Les défis de l’Internet des objets | CNRS Le journal

L’existence de réfrigérateurs équipés de Wi-Fi le prouve jusqu’à l’absurde : la liste des objets connectés s’allonge en permanence. Les applications ne manquent à vrai dire pas, que ce soit pour des réseaux de capteurs de qualité et de sécurité pour l’usine du futur, pour un escadron de drones dédiés à l’agriculture ou pour votre imprimante reliée en Bluetooth. Ces vastes réseaux d’appareils forment l’Internet des objets. Si le Web classique paraît déjà tentaculaire, ce domaine s’élargit de manière exponentielle et bouleverse autant la recherche que nos vies quotidiennes. En 2020, on estime que le nombre d’objets connectés en circulation atteindra les 50 milliards.

La densification
des données
ralentit les réseaux
et réclame
de l’énergie.

Un tel chiffre s’accompagne fatalement de défis complexes. Comment préserver la sécurité pour les quantités astronomiques de données échangées ? Comment garantir la compatibilité entre autant d’objets ? Comment empêcher ces réseaux de pulvériser les dépenses énergétiques ? De nombreux laboratoires se sont emparés de ces thématiques, comme ceux liés à l’Institut de recherche en composants logiciels et matériels pour l’information et la communication avancée (Ircica)1, à  Lille, qui fête ses dix ans.

« L’Internet des objets réclame une collaboration interdisciplinaire exploratoire, s’enthousiasme Natalie Rolland, professeure à l’université de Lille 1 et directrice de l’Ircica. Nous coopérons même avec des sociologues et nous faisons attention à ce que les gens puissent accepter ces technologies. » Son laboratoire s’apprête à inaugurer un totem en béton intelligent. Bardé de capteurs sensibles autonomes, il va permettre d’étudier l’évolution de sa structure en fonction de la température, des contraintes physiques, de l’humidité… Plus grand-chose n’échappe aux capteurs.

À l’Ircica, ce « totem » est bardé de capteurs sensibles autonomes dont les données sont renvoyées par ondes radios.

Concevoir des dispositifs souples et adaptables

En retour, cette densification des données ralentit les réseaux et réclame de l’énergie. Les chercheurs de l’Ircica et d’ailleurs jouent sur l’architecture des réseaux pour régler ces problèmes. Par exemple, trier et traiter les données directement au niveau d’un hub, un point du réseau qui concentre les informations, plutôt que d’échanger avec des data centers qui ne se trouvent pas forcément sur le même continent. Pour Laurent Clavier, professeur à l’école d’ingénieurs Télécom Lille, chercheur à l’Institut d’électronique, de microélectronique et de nanotechnologie2 et membre de l’équipe CSAM3 de l’Ircica, tout est question de compromis. « Les économies d’énergie et la fiabilité s’obtiennent plus facilement si l’information n’a pas besoin d’être transmise à quelques millisecondes près, explique le chercheur. Tout se complique si le réseau concerne les voitures autonomes ou les systèmes d’arrêt d’urgence dans les usines. Les réseaux actuels n’assurent pour l’instant pas de délais aussi courts. »

Afin de ne pas se cantonner à des niches trop restreintes pour être rentables, les équipes travaillent à des solutions souples et adaptables. Laurent Clavier évoque ainsi un projet de capteurs qui fonctionneraient même sur des rhinocéros pour alerter si un animal est pourchassé par des braconniers. On imagine alors le besoin en matériel robuste et autonome, plutôt que d’avoir à changer les piles tous les six mois sur un rhinocéros en pleine savane. Olivier Berder, professeur et responsable de l’équipe Granit4 au sein de l’Institut de recherche en informatique et systèmes aléatoires (Irisa)5, à Lannion, fait partie de ceux qui s’attachent à améliorer l’efficacité énergétique des objets connectés. « Les capteurs ne consomment pas tant d’énergie que cela, insiste celui-ci, mais les communications radio, si. Le problème empire lorsque la distance augmente et qu’elle réclame des amplificateurs. »

Dans le cadre d’un projet pour la préservation des rhinocéros, des scientifiques ont mis au point ces capteurs sans fil.

Le réveil des radios économes

Même quand ces communications ne sont pas permanentes, les objets connectés consomment autant d’énergie à les « guetter » qu’à les transmettre. Olivier Berder et son équipe travaillent donc sur des wake-up radios, des systèmes presque passifs qui restent pourtant en écoute. Seules les informations utiles sont acheminées et réveillent le microcontrôleur principal du capteur. Ces systèmes ont par contre une portée plus faible que les radios classiques. « Les wake-up radios peuvent cependant être couplées à des radios classiques ou à des récepteurs mobiles, précise Olivier Berder. Comme elles n’ont pas besoin de synchronisation, elles conviennent particulièrement bien aux systèmes autonomes, étant donné le caractère souvent imprédictible des systèmes de récupération d’énergie. »

Entre le comportement asynchrone des radios et les caprices de la récupération d’énergie, l’ensemble réclame des algorithmes de contrôle adaptés. Des méthodes issues des intelligences artificielles, de l’apprentissage par renforcement et de la logique floue sont ainsi mises à contribution. En effet, quiconque a vu son smartphone s’éteindre alors qu’il affichait encore quelques pour cent de batterie le sait : le niveau de charge d’une batterie se mesure mal en temps réel. La récupération de l’énergie n’est pas non plus linéaire, car elle dépend surtout de facteurs que l’homme ne contrôle pas forcément : l’ensoleillement, les vibrations, le vent, les gradients thermiques…

Proposer des soins à distance

Cumulées, ces innovations élargissent encore le spectre des applications de l’Internet des objets. Jean-Philippe Diguet, directeur de recherche au sein du Laboratoire des sciences et techniques de l’information, de la communication et de la connaissance (LAB-Sticc)6, à Lorient, travaille avec son équipe Mocs7 sur des systèmes sur puce et des systèmes embarqués très variés. Il a ainsi conçu le réseau de capteurs portés BoWI8, auquel Olivier Berder a également participé9. S’il évoque de loin les combinaisons de capture de mouvements utilisées en modélisation 3D, BoWI déduit les postures et les gestes de l’utilisateur en fonction de l’orientation des capteurs, sans utiliser d’équipement extérieur.

Un kinésithérapeute
peut proposer des
gestes à accomplir
et monitorer à
distance plusieurs
patients.

« Nous n’atteindrons jamais la précision de la motion capture, prévient Jean-Philippe Diguet, nous visons par exemple les applications de rééducation fonctionnelle. Un kinésithérapeute peut ainsi proposer un certain nombre de gestes à accomplir dans la journée et monitorer à distance plusieurs patients en même temps. Le système permettrait d’augmenter le nombre de séances et de réduire les coûts de transport, notamment pour les personnes à mobilité réduite. »

 

Ce capteur, développé dans le cadre du projet BoWI, permet de suivre les mouvements d’un joueur de tennis.

Du calcul haute performance à la sécurité

Preuve de la réactivité des chercheurs, le BoWI pourrait également servir à établir les comptes pénibilités mis en place depuis cet été. Les employeurs doivent en effet quantifier combien de fois leurs employés effectuent des gestes ou des postures jugés dangereux. Des capteurs légers et autonomes fourniraient des données fiables sur toute une journée de travail.

Les objets
connectés forment
tout autant de
moyens d’accès à
des informations
privées.

Jean-Philippe Diguet s’est également penché sur certains des objets connectés les plus populaires du moment : les drones. Le projet international de coopération Swarms10, monté avec une équipe australienne, consiste à intégrer du calcul haute performance au sein d’un drone afin qu’il puisse lui-même, par le biais d’une caméra, interpréter son environnement et s’y adapter.

Le traitement d’image et l’intelligence artificielle se révèlent, tout comme la communication, gourmands en énergie. Il faut donc là encore trouver un fragile équilibre qui repose sur l’architecture des réseaux et choisir à quel endroit et à quel moment effectuer les opérations les plus énergivores. « Nous travaillons aussi sur la sécurité du hardware, ajoute Jean-Philippe Diguet. Les objets connectés forment tout autant de moyens d’accès à des informations privées. Personne n’a envie que les capteurs sur son corps préviennent son assureur d’un problème de santé. Les wake-up radios ont cet avantage : moins le nœud communique, moins il s’expose. »

Améliorer l’autonomie des capteurs

Du rhinocéros aux drones, les chercheurs s’échinent donc à améliorer l’autonomie des capteurs les plus difficiles d’accès. Ces travaux concernent aussi, bien évidemment, le corps humain. Le laboratoire Techniques de l’informatique et de la microélectronique pour l’architecture des systèmes intégrés (Tima)11 a ainsi travaillé sur la récupération d’énergie pour les pacemakers. Skandar Basrour, son directeur adjoint et professeur à l’université Grenoble Alpes, est spécialisé dans la récupération d’énergie directement par le capteur. « Les mouvements du cœur émettent de l’énergie mécanique sous forme vibratoire, détaille-t-il. Or nous pouvons la convertir en énergie électrique grâce à des systèmes piézoélectriques. On obtient ainsi des pacemakers sans fil qui ne nécessitent plus de réopérer tous les huit ans. »

Les recherches pourraient aussi aboutir à des dispositifs médicaux plus autonomes en énergie, tel ce pacemaker sans fil. Actuellement, un fil est en effet nécessaire pour relier le pacemaker à un petit boîtier implanté sous la peau.

Les matériaux piézoélectriques se polarisent électriquement lorsqu’ils subissent une contrainte mécanique, un principe utilisé par exemple dans les allume-gaz et le quartz des montres. Dans le cadre des capteurs et des réseaux, cette contrainte physique peut provenir des vibrations de n’importe quel support : une voiture qui roule, un pont très emprunté, une personne qui s’active… « Ces vibrations se trouvent généralement en dessous de 200 hertz, ce qui est faible, constate Skandar Basrour. Augmenter la taille des générateurs piézoélectriques améliorerait les rendements, mais cela peut entrer en conflit avec le cahier des charges du capteur. Nous étudions donc d’autres pistes, comme les polymères électroactifs, la récupération de l’énergie électrostatique, thermique, magnétique… Tout se joue parfois au nanowatt près, mais ces grandeurs ne sont plus négligeables dans le monde des objets nomades. »

Une fois encore, ces travaux se retrouvent à l’interface entre plusieurs domaines. Rien d’étonnant à ce qu’un réseau de connaissances variées se forme pour étudier des objets eux-mêmes connectés.

Notes

  • 1. Unité CNRS/Univ. de Lille 1. Basé sur une structuration en hôtels à projet, l’Ircica s’appuie sur 3 plateformes expérimentales et sur 4 laboratoires partenaires : le Centre de recherche en informatique, signal et automatique de Lille (CNRS/Univ. de Lille 1/Centrale Lille), l’Institut d’électronique, de microélectronique et de nanotechnologie (CNRS/Centrale Lille/Isen Lille/Univ. de Lille 1/Univ. de Valenciennes et du Hainaut-Cambrésis), le Laboratoire de physique des lasers, atomes et molécules (CNRS/Univ. de Lille 1) et le Laboratoire d’électrotechnique et d’électronique de puissance de Lille (Univ. de Lille 1/Arts et Métiers ParisTech/Centrale Lille/HEI).
  • 2. Unité CNRS/Centrale Lille/Isen Lille/Univ. de Lille 1/Univ. de Valenciennes et du Hainaut-Cambrésis.
  • 3. Circuits systèmes et application multi-technologies.
  • 4. Algorithmes et architectures adaptatifs pour les systèmes sans fils efficaces en énergie.
  • 5. Unité CNRS/ENS Rennes/Inria/Insa Rennes/Institut Mines-Télécom/Univ. de Bretagne-Sud/Univ. de Rennes 1.
  • 6. Unité CNRS/Télécom Bretagne/Univ. de Bretagne occidentale/Univ. de Bretagne-Sud.
  • 7. Méthodes outils circuits systèmes.
  • 8. Body World Interactions.
  • 9. Financé par CominLabs, le projet BoWI a également impliqué l’équipe Cairn de l’Irisa.
  • 10. Conception et contrôle d’essaims de drones de surveillance.
  • 11. Unité CNRS/Grenoble INP/Univ. Grenoble Alpes.

Quel futur pour l’énergie solaire ?

Quel futur pour l’énergie solaire ? 14.09.2016, par Léa Galanopoulo Energie solaire, photovoltaique Test de performance et d’efficacité de modules solaires à couches minces dans une usine de fabrication de panneaux photovoltaïques, à Cologne, en Allemagne. T. ERNSTING/LAIF-REA Partager Entre espoirs, déceptions et avancées spectaculaires, la recherche autour de l’énergie solaire photovoltaïque avance à grands pas. Tour d’horizon des tendances les plus prometteuses avec Daniel Lincot et Pere Roca i Cabarroca

Extrait surprise : Aujourd’hui, théoriquement, on estime qu’il pourrait un jour atteindre les 85 % ! Cela prouve que, en termes de photovoltaïque, on en a encore sous le pied…

Une confirmation importante : Le « temps de retour énergétique » d’une cellule est de seulement un ou deux ans.

Un objectif concret : L’objectif phare « 30/30/30 » de l’IPVF serait d’arriver à 30 % de rendement à 30 centimes de dollars le watt en 2030.

Source : Quel futur pour l’énergie solaire ? | CNRS Le journal

L’effet photovoltaïque, découvert au XIXe siècle, repose en partie sur les propriétés des matériaux semi-conducteurs présents dans les panneaux solaires. Comment travaillez-vous à leur amélioration ?
Daniel Lincot1 :
La recherche sur l’énergie solaire photovoltaïque est un travail d’équipe. L’objectif est de fabriquer des cellules solaires plus efficaces, qui convertissent mieux la lumière du soleil en électricité, et à moindre coût. Pour augmenter le rendement des cellules photovoltaïques, il faut améliorer les propriétés semi-conductrices de chacun des matériaux présents dans la cellule, comme le silicium, mais aussi leurs combinaisons. Une cellule photovoltaïque est un peu comme une équipe de foot ! Elle doit former un tout : il y a l’individuel et le collectif. Les matériaux doivent être meilleurs à titres personnels, mais aussi capables de se faire passer des électrons entre eux.

Pere Roca i Cabarrocas2 : Lorsqu’on cherche à améliorer le rendement ou le coût, le moindre petit détail compte. La recherche sur le solaire photovoltaïque est vraiment une branche ouverte et dynamique, qui intègre la physique, l’électronique, la chimie, la science des matériaux et l’optique. Pour améliorer les cellules solaires, il nous faut cette pluridisciplinarité.

D. L. : Et la recherche avance vite. Quand les premières cellules au silicium ont été mises au point dans les années 1950, leur rendement est passé, en quelques années, de presque 0 % à plus de 10 %. Aujourd’hui, théoriquement, on estime qu’il pourrait un jour atteindre les 85 % ! Cela prouve que, en termes de photovoltaïque, on en a encore sous le pied…

Chaque jour, le soleil fourni à la Terre 3 kilowattheures par mètre carré en moyenne. Cette énergie semble inépuisable. Alors quels sont les verrous qui limitent encore son développement à large échelle ?
P. R. C. : Contrairement à ce que l’on pense, l’énergie solaire est déjà viable et compétitive. En France, EDF pousse ses consommateurs à devenir eux-mêmes producteurs d’électricité solaire. Et, dans beaucoup d’autres pays, le solaire est compétitif par rapport aux autres énergies.

D. L. : Les verrous sont pratiquement tous levés à l’échelle mondiale. Rien qu’avec Solar Impulse, on a montré que l’on pouvait alterner jour et nuit, et résoudre certains problèmes de stockage d’énergie. Tous ces verrous se lèvent simplement par la démonstration. Le seul obstacle est qu’il faudrait aller encore plus loin… En France, nous sommes encore confrontés à des verrous économiques, politiques et culturels.

Contrairement
à ce que l’on pense,
l’énergie solaire
est déjà viable
et compétitive.

P. R. C. : Solar Impulse a permis d’illustrer le fait qu’il y a des solutions et que, avec une gestion intelligente de l’énergie, on peut y arriver. Il y a des exemples encore plus convaincants, mais moins médiatiques, qui prouvent le potentiel du photovoltaïque. Avec le solaire, on peut imaginer créer de la richesse dans les pays du Sud, qui vendraient leur énergie solaire. C’est une utopie qui devient réalisable.

Le silicium, utilisé dès les années 1960 pour alimenter les satellites spatiaux, est encore aujourd’hui le matériau phare des panneaux solaires. Pourquoi n’est-il toujours pas parfait ?
D. L. : La filière silicium représente 90 % du marché de l’énergie solaire. Son principe est simple. Il consiste à découper des lingots de silicium en plaquettes pour former ensuite des cellules photovoltaïques capables de transformer l’énergie du soleil en électricité. Le problème est que le silicium a besoin de beaucoup d’épaisseur pour absorber totalement la lumière du soleil.

P. R. C. : Le rendement record du silicium est de 26,33 % en laboratoire, il faut faire plus ! On sait que l’on peut aller au delà de 60 % de rendement avec des concepts avancés comme les multijonctions . En tout cas, aucun principe de la physique ne nous l’empêche. Mieux on piège les photons, meilleur le rendement est.

Plaquette de silicium, énergie solaire, photovoltaique

Plaquette de silicium qui, après différentes opérations, sera transformée en cellule photovoltaïque.

Pour améliorer le rendement des panneaux solaires, faut-il donc envisager des matériaux plus fins ?
D. L. : Ce n’est pas vraiment une question de rendement mais plutôt de procédés et de coût. C’est tout l’enjeu de la filière dite des couches minces, qui représente environ 10 % de part de marché. Elle est composée de trois types de matériaux semi-conducteurs : le tellurure de cadmium, le Cigs3 et le silicium en couches minces. Cela consiste à recouvrir un support d’une fine couche d’un de ces matériaux. Les cellules photovoltaïques deviennent ainsi 100 fois plus fines, et donc potentiellement moins chères.

P. R. C. : La filière des couches minces silicium est vraiment très encourageante. Les modules, sur les panneaux solaires, atteignent déjà entre 12 et 15 % de rendement.

D. L. : D’ailleurs, on trouve des couches minces partout dans la vie de tous les jours. Par exemple, l’intérieur des paquets de chips est recouvert d’une couche mince d’aluminium, qui protège les aliments en empêchant l’oxygène de rentrer.

Au-delà de la question du rendement, votre objectif n’est-il pas également de prendre en compte le coût pour rendre l’énergie solaire accessible à tous ?
P. R. C. : L’objectif de la recherche sur le solaire est de faire mieux et moins cher !

D. L. : Notre but est de fabriquer de l’électricité renouvelable à bas prix. Tout le monde ne peut pas se permettre la technologie de Solar Impulse ! Mais le prix d’aujourd’hui ne sera pas forcement celui de demain. Les premiers écrans plats aussi coûtaient extrêmement cher au début. Aujourd’hui, tout le monde en a. Il y a quelques années, les modules photovoltaïques étaient de cinq à dix fois plus chers.

En termes de
solaire, on essaie
toujours
de savoir quel
matériau va
gagner la course,
mais cela dépend
beaucoup
des conditions
d’utilisation.

Certaines filières émergentes vous paraissent-elles plus prometteuses que d’autres ?
D. L. : À côté du silicium et des couches minces, il existe d’autres filières, moins développées, plus émergentes, comme le photovoltaïque à concentration. Les cellules à multijonctions utilisées sont couplées à des miroirs ou à des lentilles qui agissent comme des loupes qui peuvent alors concentrer l’énergie sur les cellules, en suivant le soleil. Le rendement record des cellules à concentration atteint 46 %. Mais leur coût de fabrication reste encore très élevé…

P. R. C. : Le photovoltaïque à concentration produit plus de watts, avec beaucoup moins de surface de cellule, mais il ne peut utiliser que le rayonnement solaire « direct », et ne fonctionne donc qu’en l’absence de nuages. En termes de solaire, on essaie toujours de savoir quel matériau va gagner la course, mais cela dépend beaucoup des conditions d’utilisation. Selon qu’il fait froid, chaud ou encore humide, chaque filière aura son efficacité. Finalement, je pense que l’idéal serait de combiner les atouts de chaque matériau.

Actuellement, le monde scientifique s’enthousiasme sur les pérovskites, un matériau utilisé en photovoltaïque depuis 2012 et aux rendements presque incroyables. Est-ce, selon vous, un réel tournant pour l’énergie solaire ?
P. R. C. : En effet, aujourd’hui la mode est aux pérovskites, un type de cellules solaires hybrides constituées d’un mélange de matériaux organiques et inorganiques. Néanmoins, il reste encore de nombreux points à éclaircir sur ce sujet, en particulier en termes de stabilité des cellules, à haute température par exemple. Pour l’instant, les pérovskites n’ont pas encore fait leurs preuves au niveau industriel.

D. L. : C’est une révolution dans le domaine. Même si les questions de stabilité et de reproductibilité se posent encore, les pérovskites ouvrent une nouvelle fenêtre pour le photovoltaïque. Actuellement, on imagine coupler ces pérovskites avec des cellules déjà existantes à base de silicium ou de Cigs. Ce sont les tandems (des empilements de deux cellules élémentaires) qui pourraient atteindre théoriquement les 40 % de rendement. C’est la raison pour laquelle l’un des projets phares de l’Institut photovoltaïque d’Île-de-France (IPVF (link is external)), dans lequel nous sommes tous les deux engagés, impliquerait la réalisation de cellules tandem.

Pérovskite, énergie solaire, photovoltaique

Visualisation de joints de grains au sein d’une pérovskite hybride par microscopie optique polarisée.

Certaines pistes de recherche ont-elles été abandonnées au fil du temps ?
D. L. : De fait oui, il y a des filières presque éteintes. Il y a quelques années, on a cru, par exemple, au sulfure de cuivre, car il est abondant dans la nature, non toxique et absorbe la lumière de manière remarquable. Dans les années 1980, c’était le Graal. Sauf que les cellules n’étaient pas assez stables et se dégradaient en quelques jours.

P. R. C. : D’autres domaines sont un peu en souffrance, comme celui des cellules photovoltaïques organiques. Il y a eu un boom dans les années 2000, qui est rapidement retombé. En réalité, les chercheurs qui travaillaient dans cette branche l’ont abandonnée au profit des pérovskites. C’est vrai que certaines cellules organiques ont encore des problèmes de stabilité, de rendement et de coût. Mais ce n’est pas une filière à écarter, car elle intéresse des marchés bien spécifiques.

Le recyclage et la durée de vie des cellules photovoltaïques font-ils également partie du cahier des charges de la recherche sur le solaire ?
D. L. : C’est très important. Nous analysons le cycle de vie des cellules, de la mine jusqu’au recyclage. On table sur des durées de vie de vingt à trente ans, voire plus. Donc on pourrait même envisager de léguer des panneaux solaires en héritage !

P. R. C. : Le marché du recyclage se développe très bien. Le « temps de retour énergétique » d’une cellule est de seulement un ou deux ans. C’est-à-dire que, en ce laps de temps, vous aurez produit la même quantité d’énergie que celle que vous aurez dépensée pour fabriquer la cellule. Vous aurez « remboursé » l’énergie. Les vingt ou trente ans de durée de vie après, c’est du bonus !

Vous êtes tous les deux engagés dans l’IPVF, qui regroupera plus de 200 chercheurs autour de l’énergie solaire. Quelles sont ses ambitions pour l’avenir ?
P. R. C. : La recherche sur le solaire photovoltaïque en France est parmi les meilleures du monde, mais nous n’avons que peu de visibilité. L’IPVF nous apporte un coup de projecteur. Et il permet également de rassembler les différentes filières : couches minces, silicium, pérovskites…

D. L. : La création de l’IPVF permet de préparer le futur pour notre pays. Nous pensons que la  décennie clé est 2020-2030. Ce seront les années du solaire, le basculement. On estime que, à cette période, la capacité de production d’électricité solaire dépassera le térawatt ! L’objectif phare « 30/30/30 » de l’IPVF serait d’arriver à 30 % de rendement à 30 centimes de dollars le watt en 2030. Pour cela, cette structure offre des possibilités remarquables de synergies public-privé, en associant à la fois des partenaires académiques comme le CNRS ou l’École polytechnique, des grands industriels, comme EDF, Total et Air Liquide, mais aussi des plus petits comme Horiba Jobin Yvon ou Riber. Le CNRS est au cœur de cette construction, c’est une grande fierté pour nous et aussi une grande responsabilité.

Energie solaire, photovoltaique

Panneaux solaires recouvrant des toits de maisons dans le quartier de Deer Valley, à Phoenix, en Arizona.

Aujourd’hui, l’énergie solaire représente seulement 1 % de l’énergie produite dans le monde. À terme, le solaire réussira-t-il à surpasser les énergies fossiles ?
P. R. C. : Bien sûr que oui ! Certes, le charbon paraît moins cher, mais c’est parce qu’on ne prend pas en compte tous les coûts à long terme sur la santé et l’environnement. Le solaire est déjà largement compétitif dans de nombreuses régions du monde, comme l’Arizona. L’avenir n’est pas dans l’énergie fossile, même si la transition ne se fera évidemment pas l’année prochaine. L’énergie solaire permet aussi bien de charger la batterie d’un portable que de fournir l’énergie nécessaire à un village entier, elle est extrêmement modulable. Et le solaire est une ressource illimitée et bon marché.

D. L. : Dans une vingtaine d’années, le solaire supplantera très probablement les filières énergétiques classiques. Aujourd’hui déjà, le photovoltaïque approche dans certains pays les 10 % de fourniture d’électricité. Nous allons apprendre à adapter notre production d’énergie aux saisons, en favorisant par exemple le solaire l’été et l’éolien ou l’hydraulique l’hiver. Le système s’équilibre finalement… Lorsque l’on travaille sur l’énergie solaire, on est forcément guidé par l’idée que c’est un bien pour l’humanité.
À lire sur le même sujet :

« Dans l’atelier du solaire »
« Le solaire a rendez-vous avec la ville »
« Photovoltaïque : la fièvre pérovskite »
« Et si on faisait planer le solaire… »

Notes

  • 1. Directeur de l’Institut de recherche et développement sur l’énergie photovoltaïque (CNRS/EDF/Chimie ParisTech) et directeur scientifique de l’Institut photovoltaïque d’Île-de-France.
  • 2. Directeur du Laboratoire de physique des interfaces et des couches minces (CNRS/École polytechnique) et directeur de la Fédération de recherche photovoltaïque.
  • 3. Diséléniure de cuivre, gallium et indium, avec un rendement record en couches minces à 22,6 %.

Edgar Morin : « Eduquer à la paix pour résister à l’esprit de guerre »

Edgar Morin : « Eduquer à la paix pour résister à l’esprit de guerre »

Le Monde.fr | • Mis à jour le | Par Edgar Morin (Sociologue et philosophe)

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Edgar Morin, le 20 octobre 2012.

Par Edgar Morin, sociologue et philosophe

La première déclaration de l’Unesco à sa fondation avait indiqué que la guerre se trouve d’abord dans l’esprit, et l’Unesco a voulu promouvoir une éducation pour la paix. Mais en fait, il ne peut être que banal d’enseigner que paix vaut mieux que guerre, ce qui est évident dans les temps paisibles. Le problème se pose quand l’esprit de guerre submerge les mentalités. Eduquer à la paix signifie donc lutter pour résister à l’esprit de guerre.

Cela dit, en temps même de paix peut se développer une forme extrême de l’esprit de guerre, qui est le fanatisme. Celui-ci porte en lui la certitude de vérité absolue, la conviction d’agir pour la plus juste cause et la volonté de détruire comme ennemis ceux qui s’opposent à lui ainsi que ceux qui font partie d’une communauté jugée perverse ou néfaste, voire les incrédules (réputés impies).

Une structure mentale commune

Nous avons pu constater dans l’histoire des sociétés humaines de multiples irruptions et manifestations de fanatisme religieux, nationaliste, idéologique. Ma propre vie a pu faire l’expérience des fanatismes nazis et des fanatismes staliniens. Nous pouvons nous souvenir des fanatismes maoïstes et de ceux des petits groupes qui, dans nos pays européens, en pleine paix, ont perpétré des attentats visant non seulement des personnes jugées responsables des maux de la société, mais aussi indistinctement des civils : fraction armée rouge de la « bande à Baader » en Allemagne, brigades noires et brigades rouges en Italie, indépendantistes basques en Espagne.

Le mot de « terrorisme » est à chaque fois employé pour dénoncer ces agissements tueurs, mais il ne témoigne que de notre terreur et nullement de ce qui meut les auteurs d’attentats. Et surtout, si diverses soient les causes auxquelles se vouent les fanatiques, le fanatisme a partout et toujours une structure mentale commune.

C’est pourquoi je préconise depuis vingt ans d’introduire dans nos écoles, dès la fin du primaire et dans le secondaire, l’enseignement de ce qu’est la connaissance, c’est-à-dire aussi l’enseignement de ce qui provoque ses erreurs, ses illusions, ses perversions.
Car la possibilité d’erreur et d’illusion est dans la nature même de la connaissance. La connaissance première, qui est perceptive, est toujours une traduction en code binaire dans nos réseaux nerveux des stimuli sur nos terminaux sensoriels, puis une reconstruction cérébrale. Les mots sont des traductions en langage, les idées sont des reconstructions en systèmes.

Réductionnisme, manichéisme, réification

Or, comment devient-on fanatique, c’est-à-dire enfermé dans un système clos et illusoire de perceptions et d’idées sur le monde extérieur et sur soi-même ? Nul ne naît fanatique. Il peut le devenir progressivement s’il s’enferme dans des modes pervers ou illusoires de connaissance. Il en est trois qui sont indispensables à la formation de tout fanatisme : le réductionnisme, le manichéisme, la réification. Et l’enseignement devrait agir sans relâche pour les énoncer, les dénoncer et les déraciner. Car déraciner est préventif alors que déradicaliser vient trop tard, lorsque le fanatisme est consolidé.

La réduction est cette propension de l’esprit à croire connaître un tout à partir de la connaissance d’une partie. Ainsi, dans les relations humaines superficielles, on croit connaître une personne à son apparence, à quelques informations, ou à un trait de caractère qu’elle a manifesté en notre présence. Là où entre en jeu la crainte ou l’antipathie, on réduit cette personne au pire d’elle-même, ou, au contraire, là où entrent en jeu sympathie ou amour, on la réduit au meilleur d’elle-même. Or, la réduction de ce qui est nôtre en son meilleur et ce qui est l’autre en son pire est un trait typique de l’esprit de guerre et il conduit au fanatisme.

La réduction est ainsi un chemin commun à l’esprit de guerre et surtout à son développement en temps de paix, qui est le fanatisme.

Un idéal de consommation, de supermarchés, de gains, de productivité, de PIB ne peut satisfaire les aspirations les plus profondes de l’être humain qui sont de se réaliser comme personne au sein d’une communauté solidaire

Le manichéisme se propage et se développe dans le sillage du réductionnisme. Il n’y a plus que la lutte du Bien absolu contre le Mal absolu. Il pousse à l’absolutisme la vision unilatérale du réductionnisme, il devient vision du monde dans laquelle le manichéisme aveugle cherche à frapper par tous les moyens les suppôts du mal, ce qui, du reste, favorise le manichéisme de l’ennemi. Il faut donc pour l’ennemi que notre société soit la pire, et que ses ressortissants soient les pires, pour qu’il soit justifié dans son désir de meurtre et de destruction. Il advient alors que, menacés, nous considérons comme le pire de l’humanité l’ennemi qui nous attaque, et nous entrons nous-mêmes plus ou moins profondément dans le manichéisme.

Il faut encore un autre ingrédient, que sécrète l’esprit humain, pour arriver au fanatisme. Celui-ci peut être nommé réification : les esprits d’une communauté sécrètent des idéologies ou visions du monde, comme elles sécrètent des dieux, qui alors prennent une réalité formidable et supérieure. L’idéologie ou la croyance religieuse, en masquant le réel, devient pour l’esprit fanatique le vrai réel. Le mythe, le dieu, bien que sécrétés par des esprits humains deviennent tout-puissants sur ces esprits et leur ordonnent soumission, sacrifice, meurtre.

Tout cela s’est sans cesse manifesté et n’est pas une originalité propre à l’islam. Il a trouvé depuis quelques décennies, avec le dépérissement des fanatismes révolutionnaires (eux-mêmes animés par une foi ardente dans un salut terrestre), un terreau de développement dans un monde arabo-islamique passé d’une antique grandeur à l’abaissement et à l’humiliation. Mais l’exemple de jeunes Français d’origine chrétienne passés à l’islamisme montre que le besoin peut se fixer sur une foi qui apporte la Vérité absolue.

« La connaissance de la connaissance »

Il nous semble aujourd’hui, plus que nécessaire, vital, d’intégrer dans notre enseignement dès le primaire et jusqu’à l’université, la « connaissance de la connaissance », qui permet de faire détecter aux âges adolescents, où l’esprit se forme, les perversions et risques d’illusion, et d’opposer à la réduction, au manichéisme, à la réification une connaissance capable de relier tous les aspects divers, voire antagonistes, d’une même réalité, de reconnaître les complexités au sein d’une même personne, d’une même société, d’une même civilisation. En bref, le talon d’Achille dans notre esprit est ce que nous croyons avoir le mieux développé et qui est, en fait, le plus sujet à l’aveuglement : la connaissance.

En réformant la connaissance, nous nous donnons les moyens de reconnaître les aveuglements auxquels conduit l’esprit de guerre et de prévenir en partie chez les adolescents les processus qui conduisent au fanatisme. A cela il faut ajouter, comme je l’ai indiqué (Les sept savoirs nécessaires à la connaissance), l’enseignement de la compréhension d’autrui et l’enseignement à affronter l’incertitude.

Tout n’est pas résolu pour autant : reste le besoin de foi, d’aventure, d’exaltation. Notre société n’apporte rien de cela, que nous trouvons seulement dans nos vies privées, dans nos amours, fraternités, communions temporaires. Un idéal de consommation, de supermarchés, de gains, de productivité, de PIB ne peut satisfaire les aspirations les plus profondes de l’être humain qui sont de se réaliser comme personne au sein d’une communauté solidaire.

Avoir foi en l’amour et la fraternité

D’autre part, nous sommes entrés dans des temps d’incertitude et de précarité, dus non seulement à la crise économique, mais à notre crise de civilisation et à la crise planétaire où l’humanité est menacée d’énormes périls. L’incertitude sécrète l’angoisse et alors l’esprit cherche la sécurité psychique, soit en se refermant sur son identité ethnique ou nationale, puisque le péril est censé venir de l’extérieur, soit sur une promesse de salut qu’apporte la foi religieuse.

C’est ici qu’un humanisme régénéré pourrait apporter la prise de conscience de la communauté de destin qui unit en fait tous les humains, le sentiment d’appartenance à notre patrie terrestre, le sentiment d’appartenance à l’aventure extraordinaire et incertaine de l’humanité, avec ses chances et ses périls.

C’est ici que l’on peut révéler ce que chacun porte en lui-même, mais occulté par la superficialité de notre civilisation présente : que l’on peut avoir foi en l’amour et en la fraternité, qui sont nos besoins profonds, que cette foi est exaltante, qu’elle permet d’affronter les incertitudes et refouler les angoisses.

  • Edgar Morin (Sociologue et philosophe)

En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/idees/article/2016/02/07/peut-on-prevenir-la-formation-du-fanatisme_4860871_3232.html#ZMv0IHfTBZaWVpdE.99

Neuf livres sur la blockchain | Contrepoints

Neuf livres sur la blockchainPublié le 27 septembre 2016 dans Technologies

Source : Neuf livres sur la blockchain | Contrepoints

À mesure que la déferlante « blockchain » prend de l’ampleur, la quantité d’âneries publiées sur ce sujet augmente de manière exponentielle. Si l’on souhaite essayer de comprendre quelque chose à ce domaine complexe, technique et mouvant, il convient d’éviter soigneusement tous les médias généralistes, de dénicher sur internet les rares synthèses sérieuses, et éventuellement de suivre l’actualité sur les sites spécialisés1. Il peut également être utile de consulter quelques ouvrages. Voici mon avis personnel sur les neuf livres que j’ai lus récemment.

Bitcoin, l’avis des pionniers

Dans Bitcoin Book (2012), Pierre Noizat, un des pionniers de Bitcoin en France, explique en détails le fonctionnement de la signature électronique, du minage, de la preuve de travail, et du caractère programmable du bitcoin (« Bitcoin » désigne le réseau, « bitcoin » la monnaie). Même si ces éléments sont parfois trop techniques pour un non-mathématicien, ils permettent de se faire une idée de ce qui contribue concrètement à la sécurisation extrême du réseau Bitcoin.

Le livre contient également des éléments de théorie des jeux, une réflexion sur l’évolution possible du bitcoin d’un statut de meta-devise vers celui de monnaie complémentaire et sur l’intérêt de son caractère déflationniste. Ce livre court, riche en descriptions techniques et en analyses économiques, est intéressant mais moins que celui écrit trois ans plus tard par le même auteur.

Avec Bitcoin, mode d’emploi – L’invention d’une liberté (2015), Pierre Noizat simplifie certains aspects de son livre précédent et en développe d’autres. Je vois deux intérêts principaux à cet ouvrage dense, exigeant et passionnant.

D’une part, il recourt aux lois de la thermodynamique pour prouver la nécessité d’un coût externe dans le processus de validation des blocs : « la sécurité des preuves de calcul est forte car elle s’appuie sur une loi physique ». Ces éléments sont capitaux pour comprendre l’important débat actuel entre « proof of work » (PoW) et « proof of stake » (PoS). D’autre part, Pierre Noizat élargit son analyse de la signification économique de Bitcoin.

Si, contrairement à son livre de 2012, il ne cite pas Bastiat et l’école autrichienne, il s’attaque plus frontalement à la « conception quasi-religieuse de la monnaie » qu’ont beaucoup de gens, ainsi qu’aux méfaits du monopole de la création monétaire dévolu aux banques centrales et délégué aux banques privées. Il s’appuie, par ailleurs, sur les analyses de Jaron Lanier pour rappeler la « face sombre des serveurs sirènes » (les GAFA) et pour montrer que le caractère décentralisé de Bitcoin permettra « de redonner au citoyen le contrôle de ses données et de construire une architecture des réseaux pour une économie pérenne ». Cet ouvrage remarquable mérite son beau sous-titre.

La Blockchain décryptée

La Blockchain décryptée – les clefs d’une révolution (2016), publié par la jeune et dynamique équipe de Blockchain France, offre une présentation courte et claire du fonctionnement de la blockchain, une description de ses premiers cas d’usage dans quelques secteurs économiques (assurances, banque, santé, etc.), et des contributions et interviews d’analystes et acteurs clés de cette technologie.

Des penseurs libéraux comme Hayek et Hernando de Soto sont cités de manière favorable, même si le lecteur libéral relèvera avec amusement quelques contresens navrants comme celui de ce « théoricien du pair-à-pair », qui estime que « Bitcoin est très influencé par la théorie politique qu’on appelle anarcho-capitaliste, qui est aussi un anarcho-totalitarisme, puisque ce mouvement prône le marché total », et qui « trouve la blockchain dangereuse parce que ce qu’elle nous annonce, c’est un totalitarisme libertaire, effrayant, terrible ». En dehors de ce genre de divagation, ce livre bien construit et facile à lire propose une large palette d’informations et analyses intéressantes.

La référence dans le domaine Bitcoin

Mastering Bitcoin : Unlocking Digital Cryptocurrencies (Andreas Antonopoulos, 2015) est un des ouvrages de référence dans le monde pour les aspects techniques de Bitcoin. Il explique comment créer un portefeuille, acquérir, envoyer et recevoir des bitcoins, et décrit clairement la manière dont fonctionne la blockchain. Mais la moitié du livre est consacrée aux manipulations à exécuter pour télécharger Bitcoin Core, c’est-à-dire l’ensemble de la blockchain Bitcoin, et devenir un « nœud » du réseau, ce qui ne peut intéresser qu’une petite minorité de développeurs.

Avec The Internet of Money (2016), Andreas Antonopoulos confirme qu’il n’est pas seulement un des meilleurs experts techniques mondiaux de Bitcoin mais aussi un vulgarisateur hors pair, doté d’une solide culture économique et historique (et d’un sens de l’humour fort appréciable). Dans ce recueil de onze conférences, il ne se contente pas de répéter comme un perroquet la tarte à la crème selon laquelle nous serions, face à Bitcoin, dans la même situation que face à Internet en 1992 : il le prouve.

Tout son livre est même construit comme une démonstration de cette idée. Même s’il n’aborde pas, loin s’en faut, tous les débats actuels (comme les risques des crowdsales ou les abus qui ont mené au désastre de The DAO et au hard-fork d’Ethereum), cet ouvrage foisonne de réflexions stimulantes dont voici un trop bref aperçu.

La fin du rêve totalitaire des États-Nations

Pour Antonopoulos, si « le rêve des États-nations de créer un système financier totalitaire est mort le 3 janvier 2009, avec l’invention de Bitcoin », la monnaie bitcoin n’est que la première application, la plus naturelle, de la blockchain. Ce système fondé sur la décentralisation, la confiance et le caractère anti-fragile rend possible une quantité incalculable d’autres applications, dont nous n’avons encore pas la moindre idée. « Affirmer que Bitcoin est une monnaie digitale est comme dire qu’Internet est une sorte de téléphone chic. C’est comme dire qu’Internet se réduit à l’e-mail ».

L’auteur montre en quoi le système bancaire qui, « sur les 50 dernières années, n’a offert que deux innovations au consommateur, les distributeurs et la carte bancaire », a déjà pratiquement perdu la guerre face à Bitcoin parce qu’une vague d’innovations sans précédent est en cours dans les startups travaillant sur la blockchain, ce dont peu de gens se rendent compte. Il explique pourquoi nous avons du mal à admettre cette réalité et en quoi le scepticisme d’une partie des élites et des experts face à Bitcoin est exactement du même type que celui rencontré par toutes les grandes ruptures technologiques qui ont bouleversé l’humanité : l’automobile, l’électricité, etc. (le maire de Paris affirmait en 1900, que la « mode » de l’électricité tomberait dans l’oubli sitôt l’Exposition universelle passée…).

Réseau idiot pour dispositifs intelligents

Pour Antonopoulos, Bitcoin est, comme Internet, un « réseau idiot qui relie des dispositifs intelligents », ce qui permet une innovation sans limites (à l’inverse du réseau téléphonique, qui était un « réseau intelligent reliant des dispositifs idiots », et dont les possibilités d’innovation étaient donc centralisées, contrôlées et restreintes), et il échappe ainsi à la « tragédie des communs » alors même qu’il est open source.

Il explique que nous sommes en train d’assister, avec Bitcoin, à une « inversion des infrastructures » similaire à celle qui a eu lieu entre l’automobile et le transport à cheval, l’électricité et le gaz, Internet et le téléphone : dans un premier temps, l’innovation disruptive cohabite de manière précaire et insatisfaisante avec le réseau de l’ancienne technologie, puis des infrastructures plus adaptées sont progressivement construites, qui permettent à la fois de rendre les anciens services de manière beaucoup plus efficiente et d’en inventer de nouveaux que personne n’aurait jamais pu prévoir.

Antonopoulos estime que la « concurrence » entre Bitcoin, Ethereum et les autres blockchains est un faux problème, et que la question de savoir quel est le nombre d’altcoins optimal revient à se demander, en 1994, combien de blogs le système Internet pourrait héberger. Il décrit de manière assez amusante l’aberration du design actuel de Bitcoin, inventé par des ingénieurs qui ont essayé de reproduire les références symboliques et le champ lexical du système bancaire alors que Bitcoin est fondamentalement autre chose.

Pour Antonopoulos, Bitcoin opère, dans le champ de la monnaie et de la valeur, le même découplage entre le media et le contenu que celui qui a eu lieu avec les inventions successives du théâtre, de l’imprimerie, de la télévision et de Twitter, évolutions qui ont systématiquement été accueillies avec incompréhension et mépris parce que les hommes continuaient à estimer la valeur du contenu par les coûts de production (fortement décroissants) du media.

Enfin, sur la question de la « scalabilité » de Bitcoin, Antonopoulos appelle à plus de prudence intellectuelle tous ceux qui oublient qu’à chaque fois que le Net a fait face au même type de problème (de Usenet à Netflix, en passant par le Web, Voice over IP et Youtube), le pessimisme unanime des meilleurs experts a toujours été réfuté par les faits.

Confiance Numérique

Dans Bitcoin et Blockchain : Vers un nouveau paradigme de la confiance numérique ? (2016), rédigé par quatre consultants et avocats, la description des fondements de Bitcoin, des premières applications de la blockchain et de ses enjeux économiques n’a pas grand intérêt. En revanche, la dernière section offre une synthèse utile sur ce que, d’un point de vue juridique, le bitcoin « ne serait pas » « semble être » et « pourrait être ».

Bit by Bit : How P2P Is Freeing the World (2015), du sémillant libertarien Jeffrey Tucker, n’est pas un livre sur la blockchain, mais Bitcoin en est un des sujets principaux. Son passage le plus intéressant est, selon moi, l’analyse du bitcoin dans la perspective de l’école autrichienne, celle ouverte en 1912 par Ludwig von Mises avec The Theory of money and credit. Tucker tente de répondre à la question que tout le monde se pose : le bitcoin est-il une monnaie ?

Parmi les éléments de réponse figure le sujet de sa compatibilité avec le théorème de régression de Mises. Tucker montre que le bitcoin a bien une valeur d’usage avant d’avoir une valeur d’échange. Il s’appuie sur les travaux d’économistes comme Peter Surda, qui aboutit à une conclusion différente de celle de Walter Block qui estime que le bitcoin, sans pour autant être encore une monnaie, a une valeur d’échange alors même qu’il n’a pas eu de valeur d’usage initiale. Le reste de ce livre agréable et très peu technique contient un rappel des théories monétaires de Menger, Mises, Hayek, Rothbard et un grand nombre de considérations pratiques et de prévisions optimistes et rafraîchissantes sur la manière dont les technologies P2P préserveront et développeront les libertés.

Surfing sur la hype de la blockchain

Dans Blockchain Revolution: How the Technology Behind Bitcoin Is Changing Money, Business, and the World (2016) Alex et Don Tapscott surfent allègrement sur la hype de la blockchain et semblent chercher à étayer de manière systématique l’idée à la mode selon laquelle la blockchain va « tout révolutionner ». Ils ont réalisé un travail de recherche considérable et offrent un panorama impressionnant (et parfois un peu indigeste) des projets en cours dans tous les secteurs économiques, sociaux et politiques, et des défis que devra relever la blockchain pour poursuivre son développement en tant que technologie disruptive majeure.

Ce livre ressemble parfois à une accumulation insuffisamment critique de pitchs survoltés de startups exaltées, et il manque d’éléments techniques crédibles qui viendraient expliquer et étayer certaines de ses affirmations et prédictions.

The Business Blockchain : Promise, Practice, and Application of the Next Internet Technology (2016) s’inscrit dans la même veine mais il est plus synthétique, plus conceptuel et moins grandiloquent. Son auteur, William Mougayar, adopte une approche de consultant en stratégie, à base de matrices et de décompositions analytiques sobres et efficaces (et parfois légèrement fumeuses).

Bien que préfacé par Vitalik Buterin, l’ouvrage ne semble pas trop biaisé en faveur d’Ethereum, même s’il évacue un peu rapidement des sujets comme le débat entre PoW et PoS. Comme le souligne Buterin, pour les pionniers de la blockchain, une des évolutions les plus étonnantes de ces deux dernières années est la vitesse avec laquelle les institutions se sont emparées de ce sujet.

Le livre présente donc les implications de la blockchain d’un point de vue business (smart property, transactions multi-signatures, smart contracts, choix délicat entre blockchain publique et privée, comparaison avec les bases de données classiques, etc.), et comment les grandes entreprises peuvent s’organiser pour prendre en compte cette technologie inattendue afin d’adapter/sauver/révolutionner leurs business models. De manière plus générale, l’auteur, se référant notamment à l’article classique de Hayek, « The Use of Knowledge in society », affirme que la blockchain va permettre une nouvelle phase de décentralisation aux conséquences insoupçonnables.

En conclusion, s’il ne fallait retenir que deux ouvrages, Bitcoin, Mode d’emploi s’imposerait pour la compréhension technique indispensable de la blockchain, et The Internet of Money pour la réflexion sur ses impacts économiques et civilisationnels.

Holacracy Constitution – Development Version 4.1

Holacracy Constitution – Development Version

Préambule

La présente “Constitution” définit les règles et les processus pour la gouvernance et les opérations d’une organisation. Les “Ratifieurs” adoptent ces règles comme étant la structure d’autorité formelle de l’ “Organisation” telle que spécifiée lors de l’adoption de la Constitution, laquelle peut être, soit l’entité dans son ensemble, soit une partie de l’entité que les Ratifieurs ont le pouvoir de gouverner et de diriger. Les Ratifieurs et tout tiers qui accepte de participer à la gouvernance et aux opérations de l’Organisation (ses “Associés”) peuvent se prévaloir des autorités conférées par la présente Constitution et acceptent d’être liés par les obligations et contraintes que celle-ci prévoit.

Article 1 : Énergiser des Rôles

1.1 Définition d’un rôle

Les Associés de l’Organisation sont généralement tenus de réaliser un travail pour le compte de l’Organisation en agissant dans le cadre d’un Rôle explicitement défini. Un « Rôle » est une entité organisationnelle dotée d’un nom descriptif et d’une ou plusieurs caractéristiques suivantes :

  • (a) la “Raison d’Être”, qui désigne une capacité, un potentiel ou un but inaccessible que le Rôle va poursuivre ou manifester au nom de l’Organisation.
  • (b) un ou plusieurs “Domaines”, qui sont des choses que le Rôle est le seul à pouvoir contrôler et réglementer comme sa propriété, au nom de l’Organisation.
  • (c) une ou plusieurs “Redevabilités”, qui désignent des activités dans la durée de l’Organisation que le Rôle va mettre en œuvre.

1.2 Responsabilités liées au Rôle

En votre qualité d’Associé de l’Organisation, vous avez les responsabilités suivantes dans le cadre de chaque Rôle auquel vous êtes affecté et que vous acceptez de remplir :

1.2.1 Processer les Tensions

Vous êtes chargé de suivre la façon dont la Raison d’Être et les Redevabilités de votre Rôle sont exprimées et de la comparer avec votre vision de leur manifestation potentielle idéale, afin d’identifier les écarts entre la réalité et le potentiel que vous percevez (chaque écart est une « Tension »). Vous êtes par ailleurs chargé de tenter de résoudre ces Tensions en utilisant les autorités et autres mécanismes dont vous disposez en vertu de la présente Constitution.

1.2.2 Processer les Raisons d’Être et les Redevabilités

Vous êtes chargé d’examiner régulièrement la façon de mettre en œuvre la Raison d’Être et chacune des Redevabilités de votre Rôle, en définissant :

  • (a) les “Prochaine-Actions” qui désignent les actions que vous pouvez exécuter immédiatement et dont l’exécution immédiate est fort utile, du moins en l’absence de priorités concurrentes ; et
  • (b) les “Projets” qui désignent des résultats précis qui requièrent l’exécution de plusieurs actions consécutives, et qu’il est utile de poursuivre, du moins en l’absence de priorités concurrentes.

1.2.3 Processer les Projets

Vous êtes chargé d’examiner régulièrement la façon de mener à bien chaque Projet sur lequel vous travaillez activement dans votre Rôle, en définissant notamment les éventuelles Prochaine-Actions utiles à l’avancement du Projet.

1.2.4 Suivre les Projets, les Prochaine-Actions et les Tensions

Vous êtes chargé d’enregistrer et de suivre tous les Projets et Prochaine-Actions dans votre Rôle dans une base de données ou sous une forme tangible similaire, et de revoir régulièrement et mettre à jour cette base de données de façon à ce que la liste du travail encours et potentiel de votre Rôle demeure fiable. Vous êtes aussi chargé de suivre les Tensions identifiées dans votre Rôle, au moins le temps de les processer en Projets ou Prochaine-Actions attendus, ou de les résoudre autrement.

1.2.5 Diriger l’Attention et les Ressources

À chaque fois que vous êtes disponible pour agir dans votre Rôle, vous êtes chargé d’examiner les Prochaine-Actions possibles que vous pourriez exécuter de façon efficiente et efficace à ce moment précis, puis d’exécuter l’action qui vous parait apporter le plus de valeur à l’Organisation.

1.3 Autorité d’Action

En tant qu’Associé affecté à un Rôle, vous avez l’autorité pour exécuter toute Prochaine-Action que vous avez de bonnes raisons de croire utile pour exprimer la Raison d’Être ou les Redevabilités de votre Rôle.

Toutefois, vous ne pouvez pas exercer de contrôle ou avoir un impact concret sur un Domaine détenu par un autre Rôle ou une autre entité souveraine, sauf si vous y êtes autorisé. L’autorité conférée par le présent paragraphe est par ailleurs limitée par les dispositions de la Section 2.1.3.

1.4 Autorité sur les Domaines

En tant qu’Associé affecté à un Rôle, vous avez l’autorité de contrôler et de réguler chaque Domaine de votre Rôle. Vous pouvez exercer cette autorité au cas par cas, lorsque des tiers demandent l’autorisation d’impacter l’un de vos Domaines, en examinant la demande puis, en l’acceptant ou en la refusant.

Vous pouvez également définir des “Politiques” pour vos Domaines, soit pour accorder à des tiers de l’autorité pour contrôler ou exercer un impact concret sur un Domaine, soit pour limiter la façon dont les tiers peuvent impacter un Domaine lorsqu’ils y sont déjà autorisés. Pour qu’une Politique soit valide, vous devez d’abord la publier sur un forum accessible à l’ensemble des Associés susceptibles d’être concernés.

Les autorités qui vous sont accordées dans la présente section peuvent en outre être limitées par des contraintes définies dans la Section 2.1.3.

Article 2 : Structure de Cercle

2.1 Notions de base

Un “Cercle” est un Rôle qui peut être décomposé et contenir lui-même des Rôles en vue de réaliser sa Raison d’Être, de contrôler ses Domaines et de mettre en œuvre ses Redevabilités. Les Rôles définis par un Cercle sont ses “Rôles Définis” et toute personne remplissant l’un de ses Rôles Définis est un “Membre de Cercle” dudit Cercle.

2.1.1 Définir des Rôles et des Politiques

Chaque Cercle va utiliser le “Processus de Gouvernance” décrit à l’Article III de la présente Constitution pour définir et modifier des Rôles au sein du Cercle ou des Politiques régissant les Domaines du Cercle. Il est interdit de définir ou de modifier des Rôles ou des Politiques d’un Cercle en dehors de son Processus de Gouvernance, sauf si c’est est expressément autorisé par d’autres règles prévues par la présente Constitution.

De plus, chaque Cercle peut contrôler ses propres fonctions et activités, lesquelles sont considérées comme un des Domaines du Cercle, dans le but de définir des Politiques visant à limiter les Rôles du Cercle.

2.1.2 Les Rôles peuvent impacter les Domaines du Cercle

Si vous remplissez un Rôle dans un Cercle, vous êtes autorisé à utiliser et à impacter tout Domaine contrôlé par le Cercle lui-même, ou tout Domaine sur lequel ce Cercle est autorisé à exercer un impact. Toutefois, vous devez respecter toute contrainte qui agit sur le Cercle lui-même ou qui est définie par Politique du Cercle, et vous ne pouvez pas contrôler ou réguler entièrement le Domaine selon les modalités de la Section 1.4 .

De plus, vous ne pouvez pas transférer ou disposer du Domaine en tant que tel ni des actifs significatifs du Domaine, ni limiter considérablement les droits du Cercle relatifs au Domaine. Toutefois, ces restrictions ne s’appliquent pas si un Rôle ou un processus qui détient l’autorité requise vous y autorise.

2.1.3 Délégation de Contrôle

Lorsqu’un Cercle définit un Domaine sur l’un de ses Rôles, l’autorité du Cercle pour impacter, contrôler et réguler ledit Domaine, est désormais déléguée audit Rôle et retirée au Cercle.

Toutefois, le Cercle conserve le droit de modifier ou de supprimer cette délégation d’autorité sur le Domaine, ou de définir ou de modifier des Politiques visant à élargir ou à limiter l’autorité du Rôle sur le Domaine.

Par défaut, toute délégation du Domaine par ce biais exclut l’autorité de disposer du Domaine lui-même ou de tout actif significatif du Domaine, ou de transférer ces actifs à l’extérieur du Cercle ou de limiter considérablement les droits du Cercle relatifs au Domaine. Un Cercle peut également déléguer ces autorités ainsi retenues par une Politique du Cercle qui accorde de manière explicite les autorisations souhaitées.

Dans tous les cas, toutes les délégations de Domaine sont toujours limitées aux autorités que le Cercle détient en premier lieu.

2.2 Premier Lien du Cercle

Chaque Cercle possède un “Rôle Premier Lien” dont la définition figure à l’Annexe A et dont les responsabilités et autorités sont définies plus loin dans la présente Section.

La personne qui remplit le Rôle de Premier Lien, lorsqu’elle agit en cette qualité, est dénommée “Rôle Premier Lien” du Cercle.

2.2.1 Porte les Fonctions Indifférenciées

Le Premier Lien du Cercle hérite de la Raison d’Être et des Redevabilités qui sont sur le Cercle en tant que tel, et contrôle tous les Domaines définis sur le Cercle, comme si le Cercle n’était qu’un Rôle rempli par le Premier Lien. Toutefois, ceci ne vaut que dans la mesure où ces Redevabilités et Domaines n’ont pas été transférés à un Rôle dans le Cercle, ou délégués autrement.

En outre, le Premier Lien n’est pas autorisé à définir des Politiques qui limitent les Rôles du Cercle, sauf par l’intermédiaire du Processus de Gouvernance du Cercle.

2.2.2 Définit les Priorités et Stratégies

Le Premier Lien du Cercle peut définir des priorités relatives pour le Cercle.

De plus, le Premier Lien peut définir une “Stratégie” plus générale pour le Cercle, ou plusieurs Stratégies, sous la forme d’heuristiques servant à guider en continu les Rôles du Cercle dans l’établissement de leurs priorités.

2.2.3 Modifier le Rôle Premier Lien

Un Cercle ne peut pas ajouter des Redevabilités ou d’autres fonctions à son propre Rôle Premier Lien, ni modifier la Raison d’Être dudit Rôle, ni supprimer complètement le Rôle.

Toutefois, un Cercle peut supprimer des Redevabilités, Domaines, autorités ou fonctions de son Rôle Premier Lien, soit en les transférant à un autre Rôle au sein du Cercle, soit en définissant d’autres moyens pour les mettre en œuvre. Dans ce cas, cela supprime automatiquement l’élément ou l’autorité concerné du Rôle Premier Lien, et ce, pendant toute la durée de la délégation.

2.3 Membres Structurels de Cercle

Certains Membres de Cercle sont autorisés à participer au Processus de Gouvernance du Cercle et sont dénommés “Membres Structurels de Cercle” du Cercle.

Les Membres Structurels de Cercle sont déterminés conformément aux règles suivantes :

2.3.1 Membres Structurels

Sauf cas de nomination à titre exceptionnel ou d’exclusion faite selon les modalités de la présente section, les Membres Structurels de Cercle d’un Cercle sont :

  • (a) chaque Associé qui remplit un Rôle Défini au sein du Cercle ;
  • (b) le Premier Lien du Cercle, tel que défini dans la Section 2.2 ;
  • (c) chaque Second Lien élu vers le Cercle, tel que défini dans la Section 2.6.4 ;
  • (d) et chaque Lien Transverse vers le Cercle, tel que défini dans la Section 2.7.

2.3.2 Exclusion pour des Rôles affectés à plusieurs personnes

Si plusieurs Associés sont affectés à un même Rôle Défini au sein d’un Cercle, le Cercle peut adopter une Politique permettant de limiter le nombre d’Associés qui sont des Membres Structurels de Cercle du fait de cette affectation audit Rôle. Toutefois, la Politique doit autoriser au moins l’un des Associés affecté au Rôle à représenter ce dernier en qualité de Membre Structurel de Cercle et elle doit préciser les modalités de désignation de ce représentant.

De plus, tout Associé qui représente un Rôle est tenu d’examiner et de processer les Tensions transmises par les Associés exclus, exactement de la même manière dont procède un Second Lien avec son Sous-Cercle, sauf si la Politique prévoit d’autres moyens pour que les Associés exclus puissent processer leurs Tensions relatives audit Rôle.

2.3.3 Exclusion pour allocations mineures

Parfois, un Associé consacre une attention très réduite, voire insignifiante, à un Rôle Défini au sein d’un Cercle. Si le Premier Lien du Cercle a des raisons de croire que c’est le cas, il peut exclure l’Associé concerné de sa fonction de Membre Structurel de Cercle acquise du fait de son affectation audit Rôle.

En cas d’exclusion d’un Associé pour les motifs précités, le Premier Lien du Cercle est tenu d’examiner et de processer les Tensions transmises par l’Associé exclu, exactement de la même manière dont procède un Second Lien avec son Sous-Cercle, sauf si d’autres moyens sont prévus pour que l’Associé puisse processer ses Tensions relatives audit Rôle.

2.3.4 Nomination à titre exceptionnel de Membres Structurels de Cercle

Le Premier Lien d’un Cercle peut nommer, à titre exceptionnel, des personnes supplémentaires dans la fonction de Membre Structurel de Cercle du Cercle, au delà de celles qui sont requises par la présente Constitution, et peut plus tard, à tout moment, supprimer ces nominations.

2.4 Affectation à un Rôle

Le Premier Lien d’un Cercle peut affecter des personnes pour remplir les Rôles Définis au sein du Cercle, à moins que cette autorité n’ait été limitée ou déléguée.

2.4.1 Rôles vacants

Chaque fois qu’un Rôle Défini dans un Cercle est vacant, le Premier Lien du Cercle est réputé remplir ce Rôle.

2.4.2 Affecter plusieurs personnes à un Rôle

Le Premier Lien peut affecter plusieurs personnes à un même Rôle Défini, tant que cela ne réduit pas la clarté sur qui doit mettre en œuvre les Redevabilités et exercer les autorités du Rôle dans les situations courantes.

Une des façons pour conserver cette clarté est que le Premier Lien définisse un “Focus” propre à chacune des affectations, sous la forme de périmètre ou de contexte, qui constitue le cadre dans lequel la personne doit exercer le Rôle.

Lorsque l’affectation d’une personne à un Rôle comporte un Focus, la Raison d’Être, les Redevabilités et les Domaines définis pour ce Rôle s’appliquent uniquement dans le cadre du Focus défini pour cette personne.

2.4.3 Démission d’un Rôle

Sauf dispositions contraires, vous pouvez démissionner à tout moment d’un Rôle que vous remplissez, en notifiant celui qui contrôle les affectations à ce Rôle, qui est généralement, le Premier Lien du Cercle.

2.5 Rôles Élus

Chaque Cercle possède un “Rôle Facilitateur”, un “Rôle Secrétaire”, et un “Rôle Second Lien” dont les définitions figurent à l’Annexe A. Il s’agit des “Rôles Élus” d’un Cercle, et la personne remplissant chacun de ces Rôles devient respectivement le “Facilitateur” , le “Secrétaire” ou le “Second Lien” lorsqu’elle agit dans sa qualité de Rôle Élu.

2.5.1 Élections et éligibilité

Le Facilitateur de chaque Cercle devra faciliter régulièrement des élections afin d’élire un Membre Structurel de Cercle dudit Cercle pour chacun de ces Rôles Élus, conformément au processus et aux règles définis à l’Article III.

Tout Membre Structurel de Cercle est éligible et peut remplir plusieurs Rôles Élus, sauf le Premier Lien d’un Cercle, qui ne peut être élu ni Facilitateur ni Second Lien.

2.5.2 Durée du mandat et réélection

Lors du processus d’élection, le Facilitateur est tenu de préciser la durée du mandat à chaque élection. À l’expiration de la durée d’un mandat, le Secrétaire est tenu d’organiser dans les meilleurs délais une nouvelle élection du Rôle Élu concerné. Toutefois, même avant l’expiration d’un mandat, tout Membre Structurel de Cercle du Cercle peut déclencher une nouvelle élection conformément au processus défini à l’Article III.

2.5.3 Modifier les Rôles Élus

Un Cercle peut ajouter des Redevabilités ou des Domaines à ses Rôles Élus, et modifier ou supprimer ces ajouts.

Toutefois, un Cercle peut uniquement effectuer des ajouts à son propre Rôle Second Lien et non à un Rôle Second Lien vers le Cercle désigné par un Sous-Cercle.

De plus, aucun Cercle ne peut modifier ou supprimer Raison d’Être, Domaine, Redevabilités ou autorités conférés à un Rôle Élu par la présente Constitution, ni supprimer entièrement un Rôle Élu.

2.5.4 Remplacement des Rôles Élus

Un remplaçant peut remplir temporairement un Rôle Élu, lorsque ce dernier est vacant, ou lorsque la personne qui remplit habituellement le rôle est indisponible au moment d’une réunion du Cercle ou s’en sent incapable ou encore est peu disposée à endosser les fonctions du Rôle.

Lorsqu’un remplacement est nécessaire, dans l’un des cas précités, le remplaçant sera, dans l’ordre de priorité suivant :

  • (a) une personne explicitement désignée par la personne qui doit être remplacée ; ou
  • (b) le tenant du Rôle Facilitateur du Cercle ; ou
  • (c) le tenant du Rôle Secrétaire du Cercle ; ou
  • (d) le Premier Lien du Cercle ; ou
  • (e) le premier Membre Structurel de Cercle du Cercle qui déclare vouloir jouer le Rôle en remplacement.

2.6 Sous-Cercle

Un Cercle peut transformer des Rôles Définis en Cercles à part entière, par le biais de son Processus de Gouvernance. Dans ce cas, le Cercle nouvellement créé devient son “Sous-Cercle” », tandis que le Cercle qui le contient devient le “Super-Cercle” de ce nouveau Sous-Cercle.

2.6.1 Modifier un Sous-Cercle

Un Cercle peut modifier Raison d’Être, Domaines ou Redevabilités d’un Sous-Cercle.

Un Cercle peut également transférer ses propres Rôles Définis ou ses Politiques vers un Sous-Cercle, ou récupérer en son sein des Rôles Définis ou Politiques du Sous-Cercle.

Toutes ces modifications doivent s’effectuer par le biais du Processus de Gouvernance du Cercle.

En dehors de ces changements autorisés, un Cercle ne peut pas modifier les Rôles Définis ou les Politiques qui sont contenus dans un Sous-Cercle.

2.6.2 Supprimer un Sous-Cercle

Un Cercle peut supprimer, par le biais de son Processus de Gouvernance, tout Sous-Cercle, soit en supprimant entièrement le Sous-Cercle ainsi que l’ensemble des éléments qu’il comporte, soit en récupérant au sein du Cercle certains éléments qui sont sélectionnés dans le Sous-Cercle. Un Sous-Cercle peut également être supprimé en le faisant redevenir un simple Rôle.

2.6.3 Premier Lien d’un Sous-Cercle

Le Premier Lien d’un Cercle peut affecter une personne pour remplir le Rôle de Premier Lien pour chaque Sous-Cercle, selon les mêmes règles que le Premier Lien utilise pour affecter n’importe lequel des Rôles Définis du Cercle.

2.6.4 Second Lien vers le Super-Cercle

Chaque Cercle élit un Second Lien vers le Super-Cercle. Toutefois, cette élection n’est pas nécessaire lorsqu’un Cercle n’a pas d’autres Membres Structurels de Cercle que ceux qui agissent en qualité de Premier Lien et de Liens Transverses vers le Cercle. Dans ce cas, même si l’élection a lieu, le Second Lien élu ne devient pas Membre Structurel de Cercle du Super-Cercle.

2.7 Lien Transverse

Un Cercle peut mettre en place une “Politique de Lien Transverse” pour inviter une entité ou un groupe à participer au Processus de Gouvernance et aux opérations au sein d’un autre Cercle. L’entité ou le groupe ainsi invité à participer devient l’“Entité Reliée”, et peut être externe à l’Organisation, ou bien être un autre Rôle ou un autre Cercle de la même Organisation. Le Cercle qui accueille ce lien est appelé le “Cercle Cible”, et c’est nécessairement le Cercle qui a créé la Politique ou l’un de ses Sous-Cercles.

Une fois la politique de Lien Transverse adoptée, l’Entité Reliée peut désigner un représentant pour participer au Cercle Cible selon les modalités prévues dans la présente section, sauf si des dispositions contraires sont prévues dans ladite Politique.

2.7.1 Rôle Lien Transverse

Si l’Entité Reliée est un Rôle, alors ce Rôle peut participer au Cercle Cible selon les modalités décrites ci-après. Il devient le “Rôle Lien Transverse” et la personne qui le remplit devient le “Lien Transverse”.

Si l’Entité Reliée est un Cercle ou un groupe, alors un nouveau Rôle Lien Transverse ad hoc est automatiquement créé, et ce Rôle fait partie à la fois de l’Entité Reliée et du Cercle Cible, tout comme un Rôle de Second Lien. Dans ce cas, le Rôle Lien Transverse a les mêmes Raison d’Être et Redevabilités que le Rôle Second Lien, à la différence près que le “Sous-Cercle” référencé en Annexe A dans la définition du Rôle Second Lien est à remplacer par l’“Entité Reliée” et le “Super-Cercle” par le “Cercle Cible”.

Si la Raison d’Être et les Redevabilités de l’Entité Reliée ne sont pas suffisamment claires, alors la Politique de Lien Transverse doit préciser davantage ce que le Rôle Lien Transverse va représenter dans le Cercle Cible.

2.7.2 Affectation du Lien Transverse

Si l’Entité Reliée est un Cercle ou un groupe, elle peut affecter une personne pour remplir le Rôle Lien Transverse selon les mêmes règles qu’elle utilise pour affecter les personnes dans les Rôles Définis ou fonctions professionnelles similaires.

Si une Entité Reliée représente un groupe qui ne dispose pas d’un lieu unique d’autorité pour procéder à cette affectation, alors le Cercle Cible peut désigner à sa place une personne pour le Rôle de Lien Transverse, sauf indication contraire de la Politique de Lien Transverse.

Dans tous les cas, une seule personne peut être affectée pour remplir chaque Rôle Lien Transverse, sauf autorisation spécifique de la Politique de Lien Transverse.

Chaque fois qu’un Rôle Lien Transverse est vacant, il est considéré comme inexistant, n’a pas d’effet et il n’y a pas d’affectation par défaut.

2.7.3 Autorité du Lien Transverse

Le Lien Transverse devient un Membre Structurel de Cercle du Cercle Cible, et peut se prévaloir des autorités d’un Membre Structurel de Cercle pour processer les Tensions liées au Cercle Cible qui limitent l’Entité Reliée.

En plus d’éliminer ces limitations, un Lien Transverse ne peut toutefois pas utiliser le Cercle Cible pour développer les capacités de l’Entité Reliée, à moins que lesdites capacités ne permettent au Cercle Cible d’exprimer davantage sa Raison d’Être ou ses Redevabilités.

2.7.4 Ajouts au Rôle Lien Transverse

Une Entité Reliée peut modifier son Rôle Lien Transverse par le biais de son propre Processus de Gouvernance.

Un Cercle Cible peut ajouter des Domaines ou des Redevabilités à un Rôle Lien Transverse par le biais de son propre Processus de Gouvernance, et peut, par la suite, modifier ou supprimer les éléments ajoutés.

2.7.5 Limites et délégation

L’Entité Reliée invitée dans un Cercle Cible peut être un Rôle contenu dans un autre Cercle. Dans ce cas, cet autre Cercle peut changer l’Entité Reliée par un autre de ses Rôles qu’il estime plus approprié, ou déléguer la sélection de l’Entité Reliée à l’un de ses Sous-Cercles.

Le Cercle Cible peut également déléguer l’obligation d’accueillir un lien à l’un de ses propres Sous-Cercles, auquel cas, ce Sous-Cercle deviendra le Cercle Cible de ce Lien.

Dans les deux cas, toute délégation doit être faite au travers d’une Politique du Cercle stipulant la délégation. Par ailleurs, tout changement ou toute délégation doit être conforme aux éventuelles contraintes ou directives énoncées dans la Politique de Lien Transverse qui a invité le lien en premier lieu.

Article 3 : Processus de Gouvernance

3.1 Cadre de la Gouvernance

Le Processus de Gouvernance d’un Cercle a le pouvoir de :

  • (a) définir, modifier ou supprimer les Rôles et les Sous-Cercles du Cercle ; et
  • (b) définir, modifier ou supprimer les Politiques du Cercle ; et
  • (c) tenir les élections des Rôles Élus du Cercle.

À chaque instant, la “Gouvernance” en vigueur d’un Cercle est définie par l’ensemble des résultats encore présents et issus du Processus de Gouvernance du Cercle.

Seuls les résultats présentés dans cette section constituent de la Gouvernance valide pour un Cercle. Nul n’est autorisé à enregistrer d’autres résultats dans les registres de Gouvernance du Cercle.

3.2 Modifier la Gouvernance

Tout Membre Structurel de Cercle peut proposer de modifier la Gouvernance de son Cercle, en faisant une “Proposition” en qualité de “Proposeur”.

Avant qu’une proposition ne soit adoptée, tous les Membres Structurels de Cercle doivent avoir la possibilité de soulever des Tensions concernant l’adoption de la Proposition. Toute Tension ainsi soulevée est considérée comme une “Objection” si elle répond aux critères définis dans cet Article, et la personne qui l’a soulevée devient l’“Objecteur”.

Les propositions sont réputées adoptées et modifient la gouvernance du Cercle seulement si aucune Objection n’est soulevée. Si des Objections sont soulevées, le Proposeur et chaque Objecteur doivent trouver un moyen de résoudre les Objections avant l’adoption de la proposition par le Cercle, après quoi tous les Membres Structurels de Cercle doivent disposer à nouveau de la possibilité de soulever d’autres Objections avant que la Proposition ne soit adoptée.

3.2.1 Faire des Propositions

Tout Membre Structurel de Cercle peut faire une proposition pendant une “Réunion de Gouvernance” du Cercle conformément aux dispositions de la Section 3.3. Par ailleurs, un Membre Structurel de Cercle peut diffuser une Proposition à tous les autres Membres Structurels de Cercle de façon asynchrone, en dehors d’une Réunion de Gouvernance, en utilisant un mode de communication par écrit approuvé à cet effet par le Secrétaire du Cercle.

Dans ce cas, le Facilitateur peut, soit appliquer le même processus et les mêmes règles que celles qui s’appliquent pendant une Réunion Gouvernance, soit autoriser chaque Membre Structurel de Cercle à déclarer directement s’il a ou non des Objections à intégrer. De plus, à tout moment avant l’adoption d’une Proposition en mode asynchrone, le Facilitateur ou tout Membre Structurel de Cercle peuvent mettre fin au processus asynchrone en demandant au Proposeur d’apporter sa Proposition à une Réunion de Gouvernance, et en avertissant le Secrétaire du Cercle.

Un Cercle peut adopter des Politiques visant à définir plus précisément quand et comment les Propositions peuvent être faites et/ou processées en dehors d’une Réunion de Gouvernance. Cependant, aucune Politique ne peut limiter le droit de mettre fin au processus asynchrone en reportant la proposition à une prochaine Réunion de Gouvernance. Un Cercle peut également mettre en place une Politique pour fixer un délai limite de réponse aux Propositions asynchrones émises, à l’issue duquel toute Proposition asynchrone est automatiquement adoptée si aucune Objection n’a été soulevée et si aucune demande pour reporter la Proposition à la prochaine réunion n’a été faite.

3.2.2 Critères de Validité d’une Proposition

Certaines Propositions ne sont pas autorisées dans le cadre du Processus de Gouvernance d’un Cercle, et le Facilitateur peut les abandonner avant qu’elles ne soient complètement processées.

Pour être valide à processer, une Proposition doit permettre de résoudre ou de réduire une Tension perçue par le Proposeur.

De plus, une Proposition doit normalement aider le Proposeur à mieux exprimer la Raison d’Être ou une Redevabilité de l’un de ses Rôles dans le Cercle. Toutefois, une Proposition peut aussi aider un autre Membre de Cercle à mieux exprimer l’un des Rôles de cette personne dans le Cercle mais seulement dans le cas où ladite personne a autorisé le Proposeur à représenter ledit Rôle. Enfin, une Proposition est toujours valide, indépendamment des critères précités, si elle est faite uniquement dans le but de faire évoluer la Gouvernance du Cercle afin de mieux refléter la réalité de l’activité, ou pour déclencher une nouvelle élection d’un Rôle Élu.

3.2.3 Tester les Propositions

Le Facilitateur peut tester la validité d’une Proposition en posant des questions au Proposeur. Pour que la Proposition passe le test, le Proposeur doit être en mesure de décrire la Tension et de donner un exemple de situation réelle, actuelle ou passée, dans laquelle la Proposition aurait déjà permis de réduire cette Tension et d’aider le Cercle de l’une des manières autorisées par la section précédente. Le Facilitateur doit abandonner la Proposition s’il estime que le Proposeur n’a pas rempli ces conditions.

Toutefois, pour évaluer la validité d’une Proposition, le Facilitateur peut seulement juger si le Proposeur a présenté l’exemple et les explications qui sont requis, et si ceux-ci ont été présentés selon un raisonnement logique et sont donc raisonnables. Le Facilitateur ne peut pas porter de jugement quant à leur exactitude, ni juger si la Proposition est susceptible de traiter la Tension.

3.2.4 Critères de Validité d’une Objection

Certaines Tensions ne comptent pas comme Objection, et peuvent être ignorées lorsqu’une Proposition est processée. Une Tension compte comme Objection si elle répond à tous les critères définis aux points (a) à (d) ci-dessous, ou au critère spécifique défini au point (e) :

  • (a) Si la Tension n’était pas traitée, la capacité du Cercle à manifester sa Raison d’Être ou à mettre en œuvre ses Redevabilités serait dégradée. Ainsi, la Tension n’est pas seulement déclenchée par une meilleure idée ou par un potentiel d’amélioration, mais parce que la Proposition pourrait réellement faire régresser les capacités actuelles du Cercle. Aux fins du présent critère, une diminution de la clarté équivaut à une dégradation de la capacité, alors qu’un simple défaut d’amélioration de clarté ne vaut pas dégradation de capacité.
  • (b) La Tension n’existe pas déjà au sein du Cercle, en l’absence de la Proposition. Ainsi, la Tension serait créée spécifiquement par l’adoption de la Proposition, et n’existerait pas si la Proposition était retirée.
  • (c) La Tension est déclenchée par des faits ou des événements connus à ce jour, sans aucune forme de prédiction de ce qui pourrait arriver dans le futur. Il est toutefois possible de se baser sur des prédictions lorsqu’il n’y a probablement pas dans le futur d’opportunité suffisante pour détecter et pouvoir s’adapter avant qu’un impact significatif ne se produise.
  • (d) La Tension limite la capacité de l’Objecteur à exprimer la Raison d’Être ou une Redevabilité de l’un de ses Rôles dans le Cercle ; ou, si elle limite un autre Rôle, l’Objecteur est autorisé à représenter ce Rôle par un Membre du Cercle qui remplit normalement ce Rôle.

Cependant, quels que soient les critères ci-dessus, une Tension concernant l’adoption d’une Proposition compte toujours comme une Objection si :

  • (e) Processer ou adopter la Proposition enfreint les règles définies dans la présente Constitution ou amène le Cercle ou ses membres à agir en dehors de l’autorité accordée en vertu de la présente Constitution. Par exemple, Prochaine-Actions, Projets, et décisions opérationnelles spécifiques sont typiquement des résultats de Gouvernance non valide conformément aux dispositions de la Section 3.1, ainsi toute personne impliquée pourrait soulever l’Objection qu’une telle Proposition visant à adopter ces résultats est susceptible de constituer une violation des règles de la Constitution.

3.2.5 Tester les Objections

Le Facilitateur peut tester la validité d’une Objection formulée en posant des questions à l’Objecteur. Pour que l’Objection formulée passe le test, l’Objecteur doit être en mesure de présenter un argument raisonnable pour expliquer en quoi l’Objection répond à chacun des critères spécifiques requis pour une Objection. Le Facilitateur doit abandonner l’Objection s’il estime que l’Objecteur n’a pas rempli ces conditions.

Pour évaluer la validité d’une Objection formulée, le Facilitateur peut seulement juger si l’Objecteur a présenté les arguments qui sont requis, et si ceux-ci ont été présentés selon un raisonnement logique et sont donc raisonnables. Le Facilitateur ne peut pas porter de jugement quant à l’exactitude d’un argument, ni juger de son importance.

Toutefois, lorsqu’une Objection à une Proposition invoque une violation de la Constitution, conformément à la Section 3.2.4 (e), le Facilitateur peut demander au Secrétaire du Cercle une interprétation pour juger si la Proposition constitue réellement une violation de la Constitution. Si le Secrétaire conclut que ce n’est pas le cas, le Facilitateur devra alors rejeter l’Objection.

3.2.6 Règles de l’Intégration

Lorsqu’une Objection à une Proposition est soulevée, les règles complémentaires exposées ci-après s’appliquent tout au long de la recherche d’une solution :

  • (a) Le Facilitateur est tenu de tester une Objection à la demande de tout Membre Structurel de Cercle, et de l’abandonner si elle ne répond pas aux critères de validité décrits dans la Section 3.2.4.
  • (b) L’Objecteur doit tenter de trouver une modification à la Proposition qui permettra de résoudre l’Objection et de répondre toujours à la Tension du Proposeur. Les autres peuvent aider. Si le Facilitateur conclut que l’Objecteur ne fait pas d’effort de bonne foi à tout moment pour trouver une modification possible, il devra considérer l’Objection comme caduque et poursuivre le traitement de la Proposition comme si l’Objection n’avait pas été soulevée.
  • (c) Tout Membre Structurel de Cercle peut poser des questions de clarification au Proposeur concernant la Tension qui sous-tend la Proposition, ou concernant des exemples que le Proposeur a donné pour illustrer la Tension. Si le Facilitateur conclut que le Proposeur ne fait pas d’effort de bonne foi à tout moment pour répondre à ces questions, il devra considérer la Proposition invalide à processer et l’abandonner.
  • (d) L’Objecteur peut suggérer une modification de la Proposition et avancer des arguments raisonnables permettant d’expliquer en quoi cette Proposition modifiée devrait résoudre et éviter la Tension dans chacune des situations spécifiques que le Proposeur a décrite pour illustrer sa Tension. Puis, à la demande de l’Objecteur, le Proposeur doit présenter un argument raisonnable expliquant pourquoi la Proposition modifiée ne permet pas de résoudre ou d’éviter la Tension dans au moins l’une des situations spécifiques déjà présentée. Sinon, le Proposeur peut présenter un nouvel exemple de situation que la Proposition modifiée ne permet pas de résoudre, mais qui doit également remplir les critères pour processer une Proposition tels que visés dans la Section 3.2.2. Si le Facilitateur conclut que le Proposeur n’a pas rempli ces conditions, il devra considérer la Proposition invalide à processer et l’abandonner.

3.3 Réunions de Gouvernance

Le Secrétaire d’un Cercle est chargé d’organiser les Réunions de Gouvernance pour mettre en œuvre le processus de Gouvernance du Cercle.

En plus des Réunions de Gouvernance ordinaires et récurrentes, le Secrétaire est chargé d’organiser rapidement des Réunions de Gouvernance exceptionnelles supplémentaires à la demande de tout Membre Structurel du Cercle.

Le Facilitateur est chargé de présider toutes les Réunions de Gouvernance conformément aux règles exposées ci-après et aux Politiques applicables au Cercle.

3.3.1 Participation

Tous les Membres Structurels de Cercle sont autorisés à participer pleinement à toutes les Réunions de Gouvernance d’un Cercle. Le Facilitateur et le Secrétaire sont également autorisés à participer pleinement et deviennent de fait Membres Structurels de Cercle pour la durée d’une Réunion de Gouvernance, même s’ils ne sont pas Membres Structurels de Cercle en temps normal.

De plus, le Premier Lien du Cercle, les Second Liens et les Liens Transverses vers le Cercle peuvent chacun inviter jusqu’à une personne supplémentaire, uniquement dans le but d’aider ce lien à processer une Tension spécifique. Le participant ainsi invité devient alors Membre Structurel de Cercle pour la durée de cette Réunion de Gouvernance.

Au-delà des personnes visées dans le présent paragraphe, personne d’autre n’est autorisé à participer aux Réunions de Gouvernance du Cercle à moins d’y être invité explicitement par une Politique du Cercle.

3.3.2 Préavis et Quorum

Un Cercle ne peut conduire son Processus de Gouvernance lors d’une réunion que si le Secrétaire a préalablement informé avec un préavis raisonnable tous les Membres Structurels de Cercle de la tenue d’une Réunion de Gouvernance, en précisant la date, l’heure et le lieu où celle-ci se tiendra.

Au-delà de cette exigence sur le préavis, aucun quorum n’est requis pour que le Cercle puisse tenir une Réunion de Gouvernance, sauf disposition contraire figurant dans une Politique du Cercle.

Toute personne qui n’assiste pas à une Réunion de Gouvernance est réputée comme ayant eu l’occasion d’examiner toutes les Propositions faites au cours de la réunion et comme n’ayant soulevé aucune Objection quant à leur adoption.

3.3.3 Processus de Réunion

Le Facilitateur est tenu d’appliquer le processus suivant lors des Réunions de Gouvernance :

  • (a) Tour d’Inclusion : le Facilitateur invite à son tour chaque participant à faire part de son état d’esprit ou de ses réflexions, ou à partager toute autre forme de commentaire d’ouverture pour la réunion. Les réactions ne sont pas autorisées.
  • (b) Points Administratifs : le Facilitateur laisse un espace pour aborder et résoudre tout sujet administratif ou logistique qu’il juge nécessaire.
  • (c) Établissement de l’Ordre du Jour et Traitement : le Facilitateur établit un ordre du jour des Tensions à processer, puis traite chaque point de l’ordre du jour, un à la fois.
  • (d) Tour de Clôture : le Facilitateur invite à son tour chaque participant à partager une réflexion de clôture ou toute autre pensée déclenchée par la réunion. Les réactions ne sont pas autorisées.

Une Politique du Cercle peut ajouter des choses à ce processus, mais ne peut en aucun cas être incompatible avec les étapes ou les autres règles définies dans cet Article de la Constitution.

3.3.4 Établissement de l’Ordre du Jour

Le Facilitateur doit établir un ordre du jour des Tensions à processer lors d’une Réunion de Gouvernance en sollicitant et en notant les points de l’ordre du jour exprimés par tous les participants. Ceci doit être fait au cours de la réunion et non à l’avance, et chaque participant peut ajouter autant de points à l’ordre du jour qu’il le souhaite. Les participants peuvent aussi ajouter des points supplémentaires à l’ordre du jour au cours de la réunion, ceci seulement entre le traitement de deux points de l’ordre du jour.

  • (a) Format des Points de l’Ordre du Jour : chaque point de l’ordre du jour d’une Réunion de Gouvernance correspond à une Tension à processer, détectée par le Participant qui l’a ajoutée à l’ordre du jour. En ajoutant un point à l’ordre du jour, un participant doit simplement indiquer un court libellé de la Tension mais ne peut pas expliquer ou parler de la Tension plus avant : ceci pourra se faire lorsque ce point de l’ordre du jour sera abordé.
  • (b) Ordre de Traitement des Points de l’Ordre du Jour : le Facilitateur peut décider de l’ordre dans lequel les points de l’ordre du jour seront traités, en appliquant le processus ou les critères qu’il juge appropriés. Le Facilitateur doit toutefois placer les points de l’ordre du jour qui requièrent l’élection de l’un des Rôles Élus du Cercle avant tous les autres points de l’ordre du jour dans le cas où l’un des participants à la réunion en fait la demande. De plus, si la réunion a été organisée à la demande expresse d’un participant, le Facilitateur doit placer tous les points de l’ordre du jour apportés par ce participant avant les points apportés par les autres participants, à moins que ledit participant n’autorise qu’il en soit procédé autrement.
  • (c) Traitement des Points de l’Ordre du Jour : après avoir déterminé l’ordre initial des points à l’ordre du jour, le Facilitateur doit amener les participants à processer chaque point de l’ordre du jour, un à la fois. Pour traiter un point de l’ordre du jour qui appelle une élection, le Facilitateur doit utiliser le « Processus d’Élection Intégrative » défini dans la Section 3.3.6. Pour les autres points de l’ordre du jour, le Facilitateur doit utiliser le « Processus de Prise de Décision Intégrative » défini dans la Section 3.3.5.

3.3.5 Processus de Prise de Décision Intégrative

Le Facilitateur doit conduire le processus de Prise de Décision Intégrative de la manière suivante :

  • (a) Présenter la Proposition : tout d’abord, le Proposeur peut décrire la Tension, et présente une Proposition visant à résoudre la Tension. Si le Proposeur demande de l’aide pour élaborer une Proposition, le Facilitateur peut autoriser une discussion ou tout autre processus collaboratif pour l’aider. Toutefois, le Facilitateur doit concentrer cette activité seulement sur l’élaboration d’une première Proposition centrée sur la Tension du Proposeur, et non sur la résolution d’autres Tensions ou sur l’intégration des préoccupations des autres dans ladite Proposition.
  • (b) Questions de Clarification : une fois la Proposition faite par le Proposeur, les autres participants peuvent poser des questions de clarification pour mieux comprendre la Proposition ou la Tension sous-jacente. Le Proposeur peut répondre à chaque question, ou ne pas le faire s’il n’a pas la réponse. Le Facilitateur doit interdire l’expression de toute réaction ou commentaire à propos de la Proposition et empêcher toute forme de discussion. Au cours de cette étape, ou plus généralement à tout moment dans le processus où un participant peut parler, ce dernier peut demander au Secrétaire de lire la Proposition qui a été saisie ou de clarifier la Gouvernance actuellement en vigueur, et le Secrétaire est tenu de répondre à la demande.
  • (c) Tour de Réaction : lorsqu’il n’y a plus de Questions de Clarification, chaque participant sauf le Proposeur, peut partager à son tour, ses réactions par rapport à la Proposition. Le Facilitateur doit immédiatement stopper et interdire tout commentaire en dehors du tour, toute tentative d’engager les autres dans un dialogue ou tout échange de quelque sorte que ce soit, ainsi que toute réaction à d’autres réactions et non à la Proposition.
  • (d) Clarifier et Modifier : après le Tour de Réaction, le Proposeur peut partager des commentaires en réponse aux réactions et/ou apporter des modifications à la Proposition. Toutefois, le but premier de toute modification doit être de tenter de répondre au mieux à la Tension du Proposeur et non aux Tensions soulevées par les autres. Lors de cette étape, le Facilitateur doit immédiatement stopper et interdire tout commentaire de la part de quiconque autre que le Proposeur ou le Secrétaire, et les interventions du Secrétaire se doivent d’être limitées uniquement à la saisie de la modification de la Proposition.
  • (e) Tour d’Objection : ensuite, chaque participant, à son tour, peut soulever des Objections potentielles à l’adoption de la Proposition. Le Facilitateur doit stopper et interdire toute forme de discussion ou de réaction. Le Facilitateur peut tester les Objections comme décrit dans la Section 3.2.5, et doit noter toute Objection valide qui subsiste à la suite du test. S’il n’y a aucune Objection valide, le Secrétaire enregistre la Proposition en tant que Gouvernance adoptée pour le Cercle.
  • (f) Intégration : en cas d’Objection valide, le Facilitateur doit ensuite faciliter une discussion visant à modifier la Proposition afin de résoudre chaque Objection, une à la fois. Le Facilitateur marque l’Objection comme étant résolue une fois que l’Objecteur confirme que la Proposition ainsi modifiée ne déclencherait plus l’Objection, et que le Proposeur confirme que la Proposition ainsi modifiée répond toujours à sa Tension initiale. Durant la discussion, le Facilitateur doit appliquer les règles d’intégration décrites dans la Section 3.2.6. Lorsque toutes les Objections qui ont été notées sont traitées, le Facilitateur refait un Tour d’Objection afin de vérifier s’il n’y a pas de nouvelle Objection à la Proposition ainsi modifiée.

3.3.6 Processus d’Élection Intégrative

Le Facilitateur doit conduire le Processus d’Élection Intégrative de la manière suivante :

  • (a) Décrire le Rôle : tout d’abord, le Facilitateur doit indiquer le Rôle dont il s’agit ainsi que la durée du mandat pour cette élection. Le Facilitateur peut aussi décrire les fonctions du Rôle et communiquer toute information pertinente concernant ce Rôle.
  • (b) Remplir les Bulletins de vote : chaque participant remplit un bulletin de vote et nomme, parmi les candidats éligibles, la personne qu’il estime convenir le mieux au Rôle. Chaque participant doit aussi indiquer son nom sur le bulletin de vote et nul ne peut s’abstenir ou nommer plusieurs personnes. Avant et durant cette étape, le Facilitateur doit stopper immédiatement tout commentaire ou discussion sur les candidats possibles et les éventuelles nominations.
  • (c) Tour de Nomination : une fois tous les bulletins de vote recueillis, le Facilitateur doit partager le contenu de chaque bulletin de vote, un par un, avec l’ensemble des participants. Lorsque le Facilitateur lit à voix haute un bulletin, son auteur doit indiquer pourquoi il estime que son candidat correspond au Rôle. Le Facilitateur doit stopper tout forme de commentaire ou de réaction ainsi que tout commentaire de l’auteur concernant d’autres candidats possibles en plus de la personne qu’il a désignée.
  • (d) Tour de Changement de Nomination : une fois que toutes les nominations sont partagées, le Facilitateur doit permettre à chaque participant de changer sa nomination s’il le souhaite. Un participant qui décide de nommer un autre candidat peut expliquer les raisons qui l’ont poussé à le faire, mais le Facilitateur doit stopper tout autre commentaire ou discussion.
  • (e) Faire une Proposition : ensuite, le Facilitateur doit compter les voix et faire une Proposition pour élire le candidat qui a reçu le plus de nominations, et ce, pour la durée qui est spécifiée. Si plusieurs candidats sont placés à égalité avec le plus grand nombre de voix, le Facilitateur peut recourir à l’une des options suivantes : (i) sélectionner au hasard et à l’aveugle l’un des candidats placés ex æquo et proposer cette personne ; ou (ii) si la personne actuellement en charge du Rôle fait partie des ex æquo, proposer cette personne ; ou (iii) si un seul des candidats placés ex æquo s’est proposé lui-même, proposer cette personne ; ou (iv) revenir à l’étape précédente et demander à chaque participant qui a désigné un autre candidat que ceux qui sont placés ex æquo, de modifier sa nomination en désignant l’un des candidats placés ex æquo, puis retourner au début de cette étape et appliquer à nouveau les règles.
  • (f) Processer la Proposition : une fois que le Facilitateur a fait une Proposition pour élire un candidat, il doit passer au Processus de Prise de Décision Intégrative pour résoudre cette Proposition. Toutefois, le Facilitateur doit commencer directement par le Tour d’Objection, et, si le candidat proposé est présent, le Facilitateur doit lui demander en dernier s’il a une Objection. En cas d’Objection, le Facilitateur peut choisir de la traiter normalement ou de retirer la Proposition, soit immédiatement après le Tour d’Objection, soit à tout moment durant l’étape d’intégration. Si le Facilitateur choisit de retirer la Proposition, il doit revenir à l’étape précédente de ce processus, retirer toutes les nominations pour le candidat proposé précédemment et appliquer à nouveau les règles de l’étape précédente pour sélectionner un autre candidat à proposer à la place.

3.3.7 Décisions Opérationnelles pendant les Réunions de Gouvernance

Les Réunions de Gouvernance visent essentiellement à soutenir le Processus de Gouvernance d’un Cercle. Dans la mesure où cela ne le détourne pas de l’objectif visé, tout participant peut toutefois accepter des Projets ou des Prochaine-Actions pendant une Réunion de Gouvernance, ou encore prendre des décisions opérationnelles qui sont en dehors du champ d’application du Processus de Gouvernance du Cercle. Cependant, le Secrétaire n’est pas autorisé à saisir de tels résultats ou décisions opérationnelles dans le compte-rendu de la Réunion de Gouvernance ou dans les registres du Cercle. Qui plus est, les résultats et décisions opérationnels pris lors d’une Réunion de Gouvernance n’ont ni plus ni moins de poids ou d’autorité que ceux pris en dehors d’une Réunion de Gouvernance.

3.4 Interpréter la Constitution et la Gouvernance

En tant qu’Associé de l’Organisation, vous pouvez faire appel à votre jugement raisonnable pour interpréter la Constitution et la Gouvernance de l’Organisation, y compris la manière dont elles s’appliquent dans une situation spécifique, et ensuite agir sur la base de votre interprétation. Vous pouvez également vous appuyer sur une interprétation explicite fournie par le Secrétaire du Cercle concerné par ladite Gouvernance. Toutefois, dans les deux cas, les modalités additionnelles suivantes s’appliquent :

3.4.1 L’interprétation du Secrétaire l’emporte

Si votre interprétation est en contradiction avec une décision d’interprétation rendue par le Secrétaire, l’interprétation du Secrétaire l’emporte sur la vôtre et s’applique à la place, et vous êtes tenu de vous y conformer jusqu’au changement de la Gouvernance qui la sous-tend.

3.4.2 L’interprétation du Super-Cercle l’emporte

Le Secrétaire d’un Cercle peut infirmer une interprétation donnée par le Secrétaire de l’un des Sous-Cercles. Si deux Secrétaires rendent des décisions contradictoires et l’une émane du Secrétaire d’un Cercle qui contient l’autre Cercle, vous êtes alors tenu de vous conformer à l’interprétation donnée par le Secrétaire du Cercle plus large.

3.4.3 Les interprétations deviennent la norme

Après avoir statué sur une interprétation, le Secrétaire peut décider de publier cette interprétation ainsi que la logique qui la sous-tend, dans les registres de Gouvernance du Cercle. En cas de publication, le Secrétaire de ce Cercle et les Secrétaires de tous les Cercles contenus dans ce dernier, sont chargés d’harmoniser toutes les décisions à venir avec la logique et les interprétations publiées précédemment.

Un Secrétaire peut contredire la logique ou les interprétations déjà publiées seulement dans le cas où un nouvel argument irréfutable ou une circonstance probante justifie un renversement. Toutefois, suite à une telle contradiction, la nouvelle logique et les interprétations deviennent la norme en vigueur sur lesquelles toutes les décisions futures devront s’aligner.

3.4.4 Rayer la Gouvernance Invalide

Tout Membre de Cercle d’un Cercle peut demander à son Secrétaire de se prononcer sur la validité de n’importe quelle Gouvernance du Cercle, ou de tout Rôle ou Sous-Cercle contenu directement ou indirectement dans le Cercle. À la suite d’une telle demande, si le Secrétaire conclut que la Gouvernance est contraire aux règles de la présente Constitution, le Secrétaire doit alors rayer la Gouvernance non conforme des registres en vigueur. Après avoir accompli cet acte, le Secrétaire doit communiquer sans délai sa décision et les raisons qui l’ont amenées à la prendre, aux Membres Structurels de Cercle qui appliquaient la Gouvernance non conforme.

3.5 Rupture de Processus

Une “Rupture de Processus” se produit lorsqu’un Cercle présente un schéma de comportement incompatible avec les règles de la présente Constitution.

3.5.1 Rupture due à un échec de la Gouvernance

Le Facilitateur d’un Cercle peut déclarer une Rupture de Processus au sein du Cercle si les Membres Structurels de Cercle ne parviennent pas à processer avec succès une Proposition lors d’une Réunion de Gouvernance, même après qu’un temps suffisamment long ait été pris pour le faire. Dans le cas où le Proposeur a demandé une Réunion de Gouvernance exceptionnelle spécialement pour traiter cette Proposition, alors ce dernier peut aussi déclarer une Rupture de Processus.

3.5.2 Rupture due à un comportement anticonstitutionnel

Le Facilitateur d’un Cercle peut déclarer une Rupture de Processus au sein de l’un de ses Sous-Cercles s’il découvre au sein d’un Sous-Cercle, un schéma de comportement ou des résultats qui sont incompatibles avec les règles de la présente Constitution. Toutefois, si ce Facilitateur est également le Premier Lien ou le Facilitateur du Sous-Cercle, alors le Secrétaire ou le Second Lien du Super-Cercle peut aussi faire cette déclaration.

3.5.3 Rétablissement de Processus

Toute déclaration de Rupture de Processus au sein d’un Cercle par une partie autorisée, déclenche les évènements suivants :

  • (a) le Facilitateur du Super-Cercle prend un Projet pour rétablir le processus dans les règles au sein du Cercle ; et
  • (b) le Facilitateur du Super-Cercle acquiert l’autorité pour prendre le relais du Facilitateur ou du Secrétaire du Cercle, ou désigner quelqu’un d’autre pour le faire ; et
  • (c) le Facilitateur du Super-Cercle acquiert l’autorité pour juger de l’exactitude des arguments présentés pour valider les Propositions ou les Objections durant le Processus de Gouvernance du Cercle.

Ces autorités sont temporaires et cessent dès que le Facilitateur du Super-Cercle conclut que le processus a été rétabli dans les règles au sein du Cercle.

3.5.4 Escalade de Rupture de Processus

La Rupture de Processus d’un Cercle peut ne pas être considérée comme une Rupture de Processus de son Super-Cercle aussi longtemps que le Facilitateur du Super-Cercle cherche à résoudre avec rapidité et assiduité la Rupture de Processus.

Toutefois, dans le cas où la Rupture de Processus n’est pas résolue dans un délai raisonnable, alors le Facilitateur de n’importe quel Super-Cercle qui contient en bout de ligne le Cercle non conforme peut aussi déclarer une Rupture de Processus au sein du Super-Cercle du Cercle non conforme.

Article 4: Processus Opérationnel

4.1 Devoirs des Membres de Cercle

Lorsque vous remplissez un Rôle dans un Cercle, vous avez des devoirs envers les autres Membres du Cercle, lorsqu’ils agissent pour le compte de Rôles du même Cercle. Ces devoirs figurent ci-après.

4.1.1 Devoir de transparence

À la demande des autres Membres du Cercle, vous devez faire preuve de transparence dans chacun des domaines suivants :

  • (a) Projets et Prochaine-Actions : vous devez partager tout Projet et/ou Prochaine-Action que vous suivez dans vos Rôles dans le Cercle.
  • (b) Priorité Relative : vous devez exprimer votre jugement concernant la priorité relative de tout Projet ou Prochaine-Action que vous poursuivez dans le cadre de vos Rôles dans le Cercle, versus toutes les autres activités possibles qui se disputent votre attention ou vos ressources.
  • (c) Projections : vous devez fournir une date projetée à laquelle vous pensez terminer tout Projet ou Prochaine Action que vous poursuivez dans l’un de vos Rôles du Cercle. Une estimation approximative tenant compte de votre contexte et priorités du moment, sans analyse ou planning détaillé, est suffisante. Cette projection n’est en aucune façon un engagement qui vous lie, et à moins que la Gouvernance n’indique le contraire, vous n’êtes pas tenu de faire un suivi de la projection, ni de gérer votre travail de façon à l’atteindre ou encore d’assurer un suivi auprès du demandeur si un changement intervient.
  • (d) Points de Check-list et Indicateurs : vous devez déclarer, pour toutes les actions récurrentes et régulières que vous réalisez dans le cadre de vos Rôles dans le Cercle, si vous les avez terminées. Vous devez également suivre et rapporter tout indicateur confié à vos Rôles par le Premier Lien du Cercle, ou par tout autre Rôle ou processus disposant de l’autorité pour définir les indicateurs du Cercle.

4.1.2 Devoir de processer

Vous avez le devoir de processer promptement les messages et les requêtes des Membres du Cercle de la manière suivante :

  • (a) Requête pour Processer : les autres Membres de Cercle peuvent vous demander de processer toute Redevabilité ou Projet dans le cadre d’un Rôle que vous remplissez au sein du Cercle. Si vous n’avez aucune Prochaine-Action de notée à ce sujet, vous devez en identifier une qui vous semble appropriée et la noter. S’il n’y en a pas, vous devez expliquer ce sur quoi vous êtes en attente. Il peut s’agir, soit d’une Prochaine-Action ou d’un Projet pris par un autre Rôle, soit d’un évènement ou d’une condition spécifique qui doit se produire avant que vous ne puissiez prendre une Prochaine-Action.
  • (b) Requête pour un Projet ou une Prochaine-Action : les autres Membres de Cercle peuvent vous demander de prendre une Prochaine Action ou un Projet particulier dans le cadre de l’un de vos Rôles dans le Cercle. Si cette Prochaine Action ou ce Projet vous parait sensé, vous devez l’accepter et le suivre. Dans le cas contraire, vous devez expliquer votre raisonnement, ou alors indiquer une autre Prochaine-Action ou Projet que vous prenez et qui vous semble répondre à l’objectif du demandeur.
  • (c) Requête pour Impacter un Domaine : les autres Membres de Cercle peuvent vous demander d’impacter un Domaine contrôlé par l’un de vos Rôles dans le Cercle. Si vous ne voyez pas d’objection à la demande, vous devez l’autoriser. Dans le cas contraire, vous devez expliquer votre(vos) Objection(s) au demandeur.

4.1.3 Devoir de priorisation

Vous avez le devoir de prioriser là où vous dirigez votre attention et vos ressources, dans le respect des contraintes suivantes :

  • (a) Processer avant toute autre action : en règle générale, vous devez donner la priorité au traitement des messages entrants provenant des autres Membres du Cercle devant l’exécution de vos propres Prochaine-Actions. Vous pouvez toutefois temporairement différer le traitement des messages pour les processer en bloc sur un seul créneau horaire ou à un moment plus opportun, sous réserve toutefois que les messages soient processés dans un délai raisonnablement rapide. Processer signifie s’engager dans le respect des règles et des devoirs décrits dans cette section, ce qui inclut, l’examen du message, la définition et la saisie le cas échéant de Prochaine-Actions ou de Projets, et, lorsque cela vous est demandé, la réponse sur la manière dont le message a été traité. Processer ne signifie pas exécuter les Prochaine-Actions ou Projets, qui n’est pas couvert par cette règle de priorisation.
  • (b) Participer aux Réunions avant toute autre action : lorsqu’un Membre du Cercle vous demande de participer à l’une des réunions requises par la présente Constitution, vous devez donner la priorité à votre participation devant l’exécution de vos propres Prochaine-Actions. Vous avez toutefois toujours la possibilité de refuser la demande si vous avez déjà des projets de programmés au même moment que la réunion, ou si la demande porte sur une série de réunions dans la durée ou sur un type de réunion, plutôt que sur une réunion spécifique.
  • (c) Les besoins du Cercle avant les objectifs individuels : vous devez intégrer et vous aligner sur toutes les priorités officielles et toutes les Stratégies du Cercle, telles que celles spécifiées par le Premier Lien du Cercle, lorsque vous évaluez comment utiliser votre temps, votre attention et vos ressources dans votre travail dans le Cercle.

4.1.4 Devoirs transmis par les Liens

En tant que Premier Lien, Second Lien ou Lien Transverse vers un Cercle, vous pouvez inviter quelqu’un d’autre à engager avec les Membres de Cercle du Cercle selon les mêmes devoirs que ceux spécifiés dans cette section. Vous ne pouvez adresser cette invitation que pour aider à processer une Tension spécifique qui affecte l’entité source dont vous êtes le lien, et seulement dans le cas où vous ressentez vous aussi la Tension et que vous restez impliqué dans son traitement. La personne que vous invitez de façon temporaire devient un Membre de Cercle à part entière, tout comme si cette personne remplissait également votre Rôle de lien, mais seulement pour ce qui concerne le traitement de cette Tension spécifique. Vous pouvez annuler cette invitation à tout moment.

4.1.5 Les Attentes implicites n’ont aucun poids

Toutes vos responsabilités et contraintes en tant qu’Associé de l’Organisation sont définies dans la présente Constitution et dans la Gouvernance qui en résulte. Toute attente ou contrainte, antérieure ou implicite ne fait pas autorité et n’a aucun poids, à moins que la Gouvernance d’un Cercle ne l’autorise explicitement, ou si elle fait partie des obligations élémentaires ou d’un accord contractuel que vous avez conclu personnellement ou qui a été conclu avec l’Organisation.

4.2 Réunion de Triage

Le Secrétaire d’un Cercle est en charge de l’organisation des « Réunions de Triage » visant à faciliter les opérations du Cercle. Le Facilitateur est chargé de présider les Réunions de Triage conformément aux règles exposées ci-après et aux politiques du Cercle concernées.

4.2.1 Focalisation et intention

Les Réunions de Triage sont organisées pour :

  • (a) partager les informations sur l’état d’achèvement des actions récurrentes, figurant sur les check-lists détenues par les Rôles du Cercle ;
  • (b) partager les indicateurs réguliers présentés par les Rôles du Cercle auxquels ils sont attribués ;
  • (c) partager les nouvelles sur l’avancement des Projets et autres travaux réalisés par les Rôles du Cercle ; et
  • (d) trier les Tensions qui limitent les rôles du Cercle en Prochaine-Actions, Projets ou autres résultats permettant de réduire ces Tensions.

4.2.2 Participation

Tous les Membres Structurels de Cercle et toute autre personne habituellement invitée à participer aux Réunions de Gouvernance du Cercle sont également invités à participer à ces Réunions de Triage, sauf disposition contraire prévue par Politique. Aucun préavis ni quorum n’est requis pour les Réunions de Triage, sauf disposition contraire prévue par Politique.

4.2.3 Facilitation et Processus

Le Facilitateur est généralement tenu d’appliquer le processus suivant lors des Réunions de Triage :

  • (a) Tour d’inclusion : le Facilitateur invite à son tour chaque participant à faire part de son état d’esprit ou ses réflexions, ou à partager toute autre forme de commentaire d’ouverture pour la réunion. Les réactions ne sont pas autorisées.
  • (b) Revue de la Check-list : le Facilitateur demande à chaque participant de vérifier l’achèvement de toutes les actions récurrentes figurant sur la check-list de ce participant.
  • (c) Revue des Indicateurs : le Facilitateur demande à chaque participant de partager les données correspondant aux indicateurs qui lui ont été attribués par le Premier Lien ou tout autre rôle ou processus en charge de définir les indicateurs du Cercle.
  • (d) Progrès Réalisés : le Facilitateur demande à chaque participant de souligner les progrès réalisés dans l’accomplissement de tout Projet ou l’expression de toute Redevabilité pour chacun de ses Rôles dans le Cercle. Les participants ne peuvent partager que les progrès réalisés depuis le dernier rapport, et non faire un point général sur un Projet ou une Redevabilité. Chaque participant peut décider quels Projets ou Redevabilités méritent de faire l’objet d’un rapport, mais si un autre Membre du Cercle demande explicitement des nouvelles d’un Projet spécifique, il convient d’inclure ce Projet tant que celui-ci n’est pas achevé ou abandonné. Concernant les rapports sur un Projet ou une Redevabilité d’un Sous-Cercle, le Facilitateur se doit d’autoriser à la fois le Premier Lien et le Second Lien du Sous-Cercle à partager les progrès réalisés.
  • (e) Points de Triage : le Facilitateur est chargé de dresser l’ordre du jour des Tensions à traiter au cours de la Réunion de Triage en demandant les points de l’ordre du jour à tous les participants, selon les mêmes règles que celles qui s’appliquent lors d’une Réunion de Gouvernance et qui sont définies dans la Section 3.3.4. Toutefois, lors des Réunions de Triage, le Facilitateur traite les points de l’ordre du jour en autorisant simplement la personne qui a apporté le point à engager avec les autres participants dans leurs Rôles et devoirs comme elle le souhaite, jusqu’à ce qu’une voie pour résoudre la Tension soit identifiée. Si des Prochaine-Actions ou des Projets sont acceptés lors de ces discussions, le Secrétaire est chargé de les enregistrer et de diffuser tous les résultats à l’ensemble des participants. Le Facilitateur doit tenter de laisser du temps pour traiter chaque point de l’ordre du jour au cours de la réunion, et pour ce faire, il peut interrompre le traitement d’un point qui prendrait plus de temps que la juste part qui lui revient compte-tenu du temps restant.
  • (f) Tour de Clôture : le Facilitateur invite à son tour chaque participant à partager une réflexion de clôture ou toute autre pensée déclenchée par la réunion. Les réactions ne sont pas autorisées.

Un Cercle peut adopter une Politique permettant d’ajouter des choses ou de modifier ce processus requis.

4.2.4 Remplacement des membres absents

Si un Rôle Défini du Cercle n’est pas représenté ou n’est représenté que partiellement lors d’une Réunion de Triage en raison de l’absence d’un membre, le Premier Lien du Cercle peut agir dans ce Rôle pour combler l’absence. Si le Premier Lien est également absent, tout participant peut accepter des Prochaine-Actions ou Projets pour le compte de ce Rôle, mais ceux-ci peuvent être traités comme des requêtes telles que définies à la Section 4.1.2(b) par la personne qui remplit habituellement le Rôle.

4.3 Action Individuelle

En tant qu’Associé de l’Organisation, vous êtes autorisé dans certains cas à agir en dehors des autorités que vous confèrent vos Rôles, ou même à enfreindre les règles de la présente Constitution. En agissant en vertu de cette autorité étendue, vous prenez une « Action Individuelle », et vous devez respecter les règles suivantes :

4.3.1 Situations autorisées

Vous pouvez prendre une Action Individuelle seulement si toutes les conditions suivantes sont remplies :

  • (a) Vous agissez en toute bonne foi pour servir la Raison d’Être ou exprimer les Redevabilités d’un certain Rôle au sein de l’Organisation ou de l’Organisation elle-même dans son ensemble.
  • (b) Vous avez de bonnes raisons de croire que votre action permettra de résoudre ou d’éviter davantage de Tension pour l’Organisation qu’elle n’est susceptible d’en créer.
  • (c) Votre Action n’amène pas, n’engage pas, ou n’autorise pas, ni ne contribue autrement à disposer des ressources ou autres actifs de l’Organisation, au-delà de ce que vous êtes autorisé à dépenser.
  • (d) Si votre action est susceptible d’enfreindre un Domaine ou une Politique, vous avez de bonnes raisons de croire que vous ne pouvez pas retarder l’action suffisamment longtemps pour demander les autorisations qui sont normalement requises ou pour proposer un changement de Gouvernance qui autoriserait votre action, sans que la valeur potentielle de cette action ne soit fortement compromise.

4.3.2 Communication et Restauration

À la suite d’une Action Individuelle, vous êtes tenu d’expliquer votre action et l’intention sous-jacente à tout Associé qui remplit un Rôle pouvant être impacté de manière significative. À la demande de l’un de ces Associés, vous êtes également tenu de prendre toute mesure raisonnable additionnelle visant à aider la résolution des Tensions créées par votre Action Individuelle.

Si votre Action Individuelle interférait réellement avec un autre Rôle ou violait un Domaine ou une Politique, vous devez alors cesser de prendre toute Action individuelle similaire à la demande de la personne qui habituellement contrôle ce Rôle, ce Domaine ou cette Politique, ou à la demande du Premier Lien du Cercle qui contient l’entité concernée.

4.3.3 Clarifier la Gouvernance

Si votre Action Individuelle est un cas d’activité récurrente ou de fonction dans la durée requise pour un Cercle, et que cette activité ou fonction n’est pas déjà formulée de façon explicite par la Gouvernance du Cercle, vous êtes alors en charge de prendre des mesures de suivi pour combler cette lacune. Ce suivi peut comporter une proposition de Gouvernance pour couvrir le besoin ou des mesures visant à supprimer à la base l’apparition de ce besoin d’activité ou de fonction.

4.3.4 Priorité des conditions corollaires

Après avoir pris une Action Individuelle, vous êtes tenu de mettre en priorité la mise en action des conditions corollaires définies dans cette section devant tout autre travail ordinaire. Toutefois, le Premier Lien du Cercle qui contient l’ensemble des Rôles sur lesquels votre action a eu un impact significatif, peut encore changer cette priorité par défaut.

Article 5: Questions d’Adoption

5.1 Les Ratifieurs cèdent l’Autorité

En adoptant la présente Constitution, les Ratifieurs cèdent leur autorité pour gouverner et diriger l’Organisation ou gérer ses Associés, et ne peuvent plus l’exercer, à l’exception toutefois de l’autorité qui leur est conférée selon les règles et processus définis par la Constitution. Toutefois, et ceci constitue une exception à la règle, les Ratifieurs continuent de détenir et exercer toutes les autorités qu’ils n’ont pas le pouvoir de déléguer, comme tout ce qui pourrait être exigé par des politiques qu’ils ne contrôlent pas ou par les statuts de l’Organisation.

5.2 Cercle d’Ancrage

Lors de l’adoption de cette Constitution, les Ratifieurs doivent créer un Cercle initial afin de manifester la Raison d’Être de l’Organisation. Ce “Cercle d’Ancrage” devient le Cercle le plus large de l’Organisation, et contrôle automatiquement tous les Domaines que l’Organisation elle-même contrôle.

5.2.1 Liens vers le Cercle d’Ancrage

Les Ratifieurs peuvent nommer au départ un Premier Lien pour le Cercle d’Ancrage.

Ils peuvent sinon laisser le Cercle d’Ancrage sans Premier Lien et créer alors un ou plusieurs Liens Transverses vers le Cercle d’Ancrage en lieu et place d’un Premier Lien.

5.2.2 Agir sans Premier Lien

Si le Cercle d’Ancrage ne dispose pas de Premier Lien, toutes les décisions qui, en temps normal, requièrent l’autorité du Premier Lien deviennent des résultats valides du Processus de Gouvernance du Cercle. Chaque Rôle au sein du Cercle peut donc exercer l’autorité d’un Premier Lien en proposant une décision qui utilise le processus et les règles définies à l’Article III, comme pour un changement de Gouvernance.

De plus, dans un Cercle d’Ancrage sans Premier Lien, l’autorité habituelle des Rôles pour impacter de façon autocratique les Domaines du Cercle (selon la Section 2.1.2) est retirée. À la place, les Rôles du Cercle ne peuvent impacter ces Domaines que dans le cas où une Politique les y autorisent de manière explicite, ou sinon, en proposant une action et en utilisant le Processus de Gouvernance du Cercle, exactement de la même façon que celle décrite plus haut pour exercer l’autorité du Premier Lien.

5.2.3 Raison d’Être de l’Organisation

Le Cercle d’Ancrage est automatiquement redevable d’identifier et d’exprimer la Raison d’Être de l’Organisation dans son ensemble. La Raison d’Être de l’Organisation désigne le potentiel créatif le plus profond que l’Organisation peut durablement exprimer dans le monde, compte tenu de l’ensemble des contraintes auxquelles celle-ci est soumise et de toutes les choses dont elle dispose. Il s’agit notamment, de son histoire, de ses capacités actuelles, de ses ressources disponibles, de ses Associés, de son caractère, de sa culture, de la structure d’affaires, de la marque, de la connaissance du marché, ainsi que toutes les autres ressources ou facteurs pertinents.

Le Premier Lien du Cercle d’Ancrage hérite de cette Redevabilité par défaut, et peut enregistrer et mettre à jour la Raison d’Être afin d’exprimer cette Redevabilité.

Si le Cercle d’Ancrage est sans Premier Lien, cette Redevabilité relève alors automatiquement de chaque Lien Transverse du Cercle d’Ancrage, et chacun d’entre eux peut mettre à jour la Raison d’Être en proposant une modification via le Processus de Gouvernance du Cercle.

5.2.4 Modifier le Cercle d’Ancrage

Le Premier Lien du Cercle d’Ancrage a autorité pour nommer le Cercle, clarifier ses Domaines et ajouter ou modifier ses Redevabilités.

Le Premier Lien du Cercle d’Ancrage peut également désigner, à sa discrétion, son propre remplaçant, sauf indication contraire des Ratifieurs.

5.2.5 Pas de Super-Cercle

Le Cercle d’Ancrage ne dispose pas de Super-Cercle, et ne désigne pas de Second Lien.

5.3 Structure initiale

Le Premier Lien du Cercle d’Ancrage peut définir une structure initiale et autre gouvernance pour l’Organisation, en dehors du Processus de Gouvernance habituel prévu par la présente Constitution. Si cette structure initiale comporte d’autres Cercles, les Premiers Liens de ces Cercles peuvent faire de même au sein de leurs Cercles. Cette autorité ne peut être utilisée que dans le seul but de définir une structure initiale d’un Cercle au départ, avant la mise en application du Processus de Gouvernance dudit Cercle.

5.4 Politiques et Système existants

Toutes les politiques et les systèmes existants qui étaient en vigueur dans l’Organisation avant l’adoption de la présente Constitution, le demeurent pleinement après son adoption, même s’ils comportent des contraintes ou des autorités qui ne figurent pas dans les registres de Gouvernance. Peuvent notamment être visés : les systèmes de rémunération, les processus d’embauche et de licenciement, les politiques liées au travail, etc.

Toutefois, ces politiques et systèmes existants perdront tout leur poids et autorité dès qu’est définie la Gouvernance qui les remplace ou les contredit. De plus, ces politiques et systèmes existants ne peuvent pas être modifiés ou ajoutés sous leur forme actuelle. Toute personne qui souhaite procéder à une modification ou un ajout doit d’abord intégrer ou mettre en œuvre autrement la politique ou le système en utilisant le Processus de Gouvernance défini dans la présente Constitution.

5.5 Modifications et Abrogation de la Constitution

Les Ratifieurs ou leurs successeurs peuvent modifier la présente Constitution ou procéder à son abrogation complète, en s’appuyant sur les mêmes autorités et processus utilisés pour son adoption. Les modifications doivent être apportées par écrit et publiées de façon à ce que tous les Associés de l’Organisation puissent en prendre connaissance.

Coup de frein sur les voitures autonomes, les Google cars remises en cause – InformatiqueNews.fr

Coup de frein sur les voitures autonomes, les Google cars remises en cause

Source : Coup de frein sur les voitures autonomes, les Google cars remises en cause – InformatiqueNews.fr

Depuis mercredi dernier, Google affronte, dans la presse et sur le terrain, les fonctionnaires californiens du DMV (Department of Motor Vehicles) sur les projets de règlements de voitures « autoconduites ». Après avoir investi 60 millions de dollars dans l’intelligence artificielle automobile, Google attendait depuis 2012 que l’état de Californie en termine avec ses études de faisabilité.

Mais depuis mercredi dernier, c’est la douche froide, le DMV a publié un rapport, trés orienté sécurité, qui impose une floppée de contraintes qui remettent ses projets d’autonomie aux calendes grecques. La directrice du DMV, Jean Shiomoto ( photo) a précisé dans le communiqué accompagnant le nouveau règlement que l’objectif principal de la législation proposée « est la sécurité des véhicules autonomes et la sécurité du public qui va partager la route avec ces véhicules « . Le gouvernement californien, en invoquant la sécurité, ne veut surtout pas, à notre avis, remettre en cause les firmes impliquées dans la situation économique actuelle du secteur automobile. Ainsi, il faudra disposer d’un permis et passer une qualification, ce qui démolit l’objectif original des Google cars, des sortes de taxis pour personnes dépendantes que l’on pourrait piloter en entrant une adresse de destination. Dans le même document, sorte de règlement publié mercredi, un détenteur de permis de conduire devrait être dans la voiture, prêt à prendre le relais en cas de besoin, ce qui impose des pédales de frein, d’accélérateur et un volant, trois éléments absents de googles cars actuelles. Le pilote sera responsable de toutes les violations de la circulation. C’est d’ailleurs cette notion de responsabilité des accidents qui a pesé lourd dans les choix du DMV.

Un conducteur classique serait plus fiable qu’un ordinateur ?

Google est en désaccord total avec cette idée d’homme « plus sûr que la machine », précisant que toute la technologie développée jusque-là avait pour but d’aider les gens qui ne peuvent pas conduire, comme les handicapés et les personnes âgées. Google qui, en quatre ans, a créé une voiture autonome l’aurait fait rouler sur plus de 1,6 million de kilomètres en Californie et au Texas sans accidents notoires. Pour Google, sa technologie serait donc suffisamment aboutie pour passer dans une nouvelle phase, immédiatement d’ailleurs, dans des lieux moins fréquentés que les routes de campagne comme des campus universitaires ou de ceux de grandes entreprises.

Les espoirs liés au projet de Jerry Brown paraissent abandonnés

On est désormais loin de la signature du projet de loi signé par le sénateur Jerry Brown en Septembre 1992. (photo avec Sergei Brin au premier plan). Ce jour-là, le cofondateur de Google, Sergey Brin avait prédit que les véhicules autonomes seraient disponibles dans les cinq ans. Le porte-parole de Google, Johnny Luu dans son  communiqué ajoutait : « Nous sommes gravement déçus que la Californie soit déjà en train de limiter le potentiel des voitures entièrement autonomes pour la conduite pour aider tous ceux qui vivent ici ». D’autres contraintes seront imposées aux constructeurs automobiles qui devront passer des tests pour vérifier que la voiture sans conducteur est prête pour les routes publiques. Plus compliqués à suivre, ces véhicules devront être surveillés par des rapports mensuels sur les performances, l’utilisation et la sécurité. En outre , les voitures ne  pourraient être que louées — mais pas vendues — au public. Google qui se présente comme la victime expiatoire d’un groupe de fonctionnaires ‘peureux’ n‘est pas la seule à voir ses projets de développement remis en cause. Tesla, Nissan, BMW et Mercedes-Benz, qui testent depuis plusieurs années des véhicules autonomes font la grimace, selon nos confrères américains. A qui profite ce coup de frein ? Les mauvaises langues rappelaient que la puissance des lobbys des géants de Detroit favorisait toujours les constructeurs historiques locaux au détriment des nouveaux arrivants et des étrangers.

Google a ce projet compromis en travers de la gorge

Le porte-parole de Google, Johnny Luu, a déclaré que la priorité absolue de Google était aussi la sécurité, et que les voitures sans conducteur visent à réduire le nombre d’accidents causés par une erreur humaine. Certains experts disent que la présence d’un conducteur détenteur de permis et donc responsable d’un véhicule autonome ne le rendrait pas plus sécurisé. Don Norman, professeur et directeur du Design Lab à l’UC San Diego avait d’ailleurs récemment rappelé que « Les  véhicules autonomes les plus dangereux sont ceux qui requièrent la surveillance humaine. Les gens sont incapables de contrôler quelque chose sur de longues périodes, puis prendre le contrôle quand une urgence survient. Des décennies de recherches scientifiques et l’expérience acquise avec des pilotes bien formés, dans l’aviation commerciale, le démontrent tous les jours. »

La déception ne va pas se limiter aux USA

En France, l’Observatoire Cetelem de l’Automobile 2016 a justement remis cette semaine un rapport sur les véhicules autonomes. Il a interrogé sur ce sujet plusieurs milliers d’automobilistes, dans quinze grands pays du monde, par le bureau d’étude TNS Sofres. Ceux-ci estimaient à 75 % que la voiture autonome deviendrait une réalité. 55 % d’entre eux songent même à terme d’acheter une Google Car ou une hypothétique Apple Car. Paradoxalement, les plus enthousiastes en matière de véhicules autonomes n’étaient pas les Américains à 27 % mais les Chinois à 91 %. Ces chiffres varient énormément de 41 % chez les Français, 65 % chez les Italiens, 73 % chez les Brésiliens ou encore 81 % chez les Turcs. Pour Flavien Neuvy de Cetelem (photo) : « Au niveau global, les sondés ont aussi indiqué que les acteurs les plus légitimes pour faire évoluer la voiture traditionnelle vers la voiture connectée étaient dans l’ordre décroissant les constructeurs, les spécialistes des nouvelles technologies et les équipementiers, 77 % de sondés ont estimé qu’une voiture connectée doit avoir pour ‘mission la sécurité (77 % des économies et 50 % l’optimisation du temps de trajet).

De l’autonomie à l’aide au pilotage.

Face aux voitures autonomes, Carlos Goshn, le PDG de Renault/Nissan avait, lors du salon de Tokyo, (photo ci-dessous)  pour sa part, mis en valeur la technologie maison, le »Nissan Intelligent driving « qui aiderait le conducteur à voir, penser et réagir plus vite. Lors du même salon nippon, Volvo, qui a fait de la sécurité son cheval de bataille, a promis qu’en 2020, il n’y aurait plus de morts ni de blessés graves dans les véhicules de sa marque grâce à ses aides au pilotage. Ce qui est actuellement sûr, c’est qu’il n’y aura pas de voitures autonomes en 2016 et que si elles apparaissent en 2017, il ne s’agirait que de véhicules où l’autonomie viendrait au secours du pilote comme chez Nissan. L’Europe aura-t-elle le temps d’imposer d’autres réflexions ? Des débats de ce type ont déjà eu lieu avec les pilotes automatiques des avions, ceux des grands bateaux et ceux des métros et à chaque fois, les solutions techniques étaient remises en cause par les législations existantes. Seul le métro autonome comme celui des lignes de la RATP 1 et 14, a réussi à s’imposer. Avec l’automobile, les probabilités de contacts accidentels sont malheureusement bien plus grandes.

Lettre aux français, de Maurice Allais

Lettre aux français de Maurice Allais, dans Marianne (voir à la suite l’article de présentation de cette lettre)

J’ai trouvé ca sur le site « Les crises », avec des extraits des ouvrages de Maurice Allais

Le point de vue que j’exprime est celui d’un théoricien à la fois libéral et socialiste. Les deux notions sont indissociables dans mon esprit, car leur opposition m’apparaît fausse, artificielle. L’idéal socialiste consiste à s’intéresser à l’équité de la redistribution des richesses, tandis que les libéraux véritables se préoccupent de l’efficacité de la production de cette même richesse. Ils constituent à mes yeux deux aspects complémentaires d’une même doctrine. Et c’est précisément à ce titre de libéral que je m’autorise à critiquer les positions répétées des grandes instances internationales en faveur d’un libre-échangisme appliqué aveuglément.

Le fondement de la crise : l’organisation du commerce mondial

La récente réunion du G20 a de nouveau proclamé sa dénonciation du « protectionnisme » , dénonciation absurde à chaque fois qu’elle se voit exprimée sans nuance, comme cela vient d’être le cas. Nous sommes confrontés à ce que j’ai par le passé nommé « des tabous indiscutés dont les effets pervers se sont multipliés et renforcés au cours des années » (1). Car tout libéraliser, on vient de le vérifier, amène les pires désordres. Inversement, parmi les multiples vérités qui ne sont pas abordées se trouve le fondement réel de l’actuelle crise : l’organisation du commerce mondial, qu’il faut réformer profondément, et prioritairement à l’autre grande réforme également indispensable que sera celle du système bancaire.

Les grands dirigeants de la planète montrent une nouvelle fois leur ignorance de l’économie qui les conduit à confondre deux sortes de protectionnismes : il en existe certains de néfastes, tandis que d’autres sont entièrement justifiés. Dans la première catégorie se trouve le protectionnisme entre pays à salaires comparables, qui n’est pas souhaitable en général. Par contre, le protectionnisme entre pays de niveaux de vie très différents est non seulement justifié, mais absolument nécessaire. C’est en particulier le cas à propos de la Chine, avec laquelle il est fou d’avoir supprimé les protections douanières aux frontières. Mais c’est aussi vrai avec des pays plus proches, y compris au sein même de l’Europe. Il suffit au lecteur de s’interroger sur la manière éventuelle de lutter contre des coûts de fabrication cinq ou dix fois moindres – si ce n’est des écarts plus importants encore – pour constater que la concurrence n’est pas viable dans la grande majorité des cas. Particulièrement face à des concurrents indiens ou surtout chinois qui, outre leur très faible prix de main-d’œuvre, sont extrêmement compétents et entreprenants.

Il faut délocaliser Pascal Lamy !

Mon analyse étant que le chômage actuel est dû à cette libéralisation totale du commerce, la voie prise par le G20 m’apparaît par conséquent nuisible. Elle va se révéler un facteur d’aggravation de la situation sociale. À ce titre, elle constitue une sottise majeure, à partir d’un contresens incroyable. Tout comme le fait d’attribuer la crise de 1929 à des causes protectionnistes constitue un contresens historique. Sa véritable origine se trouvait déjà dans le développement inconsidéré du crédit durant les années qui l’ont précédée. Au contraire, les mesures protectionnistes qui ont été prises, mais après l’arrivée de la crise, ont certainement pu contribuer à mieux la contrôler. Comme je l’ai précédemment indiqué, nous faisons face à une ignorance criminelle. Que le directeur général de l’Organisation mondiale du commerce, Pascal Lamy, ait déclaré : « Aujourd’hui, les leaders du G20 ont clairement indiqué ce qu’ils attendent du cycle de Doha : une conclusion en 2010 » et qu’il ait demandé une accélération de ce processus de libéralisation m’apparaît une méprise monumentale, je la qualifierais même de monstrueuse. Les échanges, contrairement à ce que pense Pascal Lamy, ne doivent pas être considérés comme un objectif en soi, ils ne sont qu’un moyen. Cet homme, qui était en poste à Bruxelles auparavant, commissaire européen au Commerce, ne comprend rien, rien, hélas ! Face à de tels entêtements suicidaires, ma proposition est la suivante : il faut de toute urgence délocaliser Pascal Lamy, un des facteurs majeurs de chômage !

Plus concrètement, les règles à dégager sont d’une simplicité folle : du chômage résulte des délocalisations, elles-mêmes dues aux trop grandes différences de salaires… À partir de ce constat, ce qu’il faut entreprendre en devient tellement évident ! Il est indispensable de rétablir une légitime protection. Depuis plus de dix ans, j’ai proposé de recréer des ensembles régionaux plus homogènes, unissant plusieurs pays lorsque ceux-ci présentent de mêmes conditions de revenus, et de mêmes conditions sociales. Chacune de ces « organisations régionales » serait autorisée à se protéger de manière raisonnable contre les écarts de coûts de production assurant des avantages indus a certains pays concurrents, tout en maintenant simultanément en interne, au sein de sa zone, les conditions d’une saine et réelle concurrence entre ses membres associés.

Un protectionnisme raisonné et raisonnable

Ma position et le système que je préconise ne constitueraient pas une atteinte aux pays en développement. Actuellement, les grandes entreprises les utilisent pour leurs bas coûts, mais elles partiraient si les salaires y augmentaient trop. Ces pays ont intérêt à adopter mon principe et à s’unir à leurs voisins dotés de niveaux de vie semblables, pour développer à leur tour ensemble un marché interne suffisamment vaste pour soutenir leur production, mais suffisamment équilibré aussi pour que la concurrence interne ne repose pas uniquement sur le maintien de salaires bas. Cela pourrait concerner par exemple plusieurs pays de l’est de l’Union européenne, qui ont été intégrés sans réflexion ni délais préalables suffisants, mais aussi ceux d’Afrique ou d’Amérique latine.

L’absence d’une telle protection apportera la destruction de toute l’activité de chaque pays ayant des revenus plus élevés, c’est-à-dire de toutes les industries de l’Europe de l’Ouest et celles des pays développés. Car il est évident qu’avec le point de vue doctrinaire du G20, toute l’industrie française finira par partir à l’extérieur. Il m’apparaît scandaleux que des entreprises ferment des sites rentables en France ou licencient, tandis qu’elles en ouvrent dans les zones à moindres coûts, comme cela a été le cas dans le secteur des pneumatiques pour automobiles, avec les annonces faites depuis le printemps par Continental et par Michelin. Si aucune limite n’est posée, ce qui va arriver peut d’ores et déjà être annoncé aux Français : une augmentation de la destruction d’emplois, une croissance dramatique du chômage non seulement dans l’industrie, mais tout autant dans l’agriculture et les services.

De ce point de vue, il est vrai que je ne fais pas partie des économistes qui emploient le mot « bulle ». Qu’il y ait des mouvements qui se généralisent, j’en suis d’accord, mais ce terme de « bulle » me semble inapproprié pour décrire le chômage qui résulte des délocalisations. En effet, sa progression revêt un caractère permanent et régulier, depuis maintenant plus de trente ans. L’essentiel du chômage que nous subissons —tout au moins du chômage tel qu’il s’est présenté jusqu’en 2008 — résulte précisément de cette libération inconsidérée du commerce à l’échelle mondiale sans se préoccuper des niveaux de vie. Ce qui se produit est donc autre chose qu’une bulle, mais un phénomène de fond, tout comme l’est la libéralisation des échanges, et la position de Pascal Lamy constitue bien une position sur le fond.

Crise et mondialisation sont liées

Les grands dirigeants mondiaux préfèrent, quant à eux, tout ramener à la monnaie, or elle ne représente qu’une partie des causes du problème. Crise et mondialisation : les deux sont liées. Régler seulement le problème monétaire ne suffirait pas, ne réglerait pas le point essentiel qu’est la libéralisation nocive des échanges internationaux, Le gouvernement attribue les conséquences sociales des délocalisations à des causes monétaires, c’est une erreur folle.

Pour ma part, j’ai combattu les délocalisations dans mes dernières publications (2). On connaît donc un peu mon message. Alors que les fondateurs du marché commun européen à six avaient prévu des délais de plusieurs années avant de libéraliser les échanges avec les nouveaux membres accueillis en 1986, nous avons ensuite, ouvert l’Europe sans aucune précaution et sans laisser de protection extérieure face à la concurrence de pays dotés de coûts salariaux si faibles que s’en défendre devenait illusoire. Certains de nos dirigeants, après cela, viennent s’étonner des conséquences !

Si le lecteur voulait bien reprendre mes analyses du chômage, telles que je les ai publiées dans les deux dernières décennies, il constaterait que les événements que nous vivons y ont été non seulement annoncés mais décrits en détail. Pourtant, ils n’ont bénéficié que d’un écho de plus en plus limité dans la grande presse. Ce silence conduit à s’interroger.

Un prix Nobel… téléspectateur

Les commentateurs économiques que je vois s’exprimer régulièrement à la télévision pour analyser les causes de l’actuelle crise sont fréquemment les mêmes qui y venaient auparavant pour analyser la bonne conjoncture avec une parfaite sérénité. Ils n’avaient pas annoncé l’arrivée de la crise, et ils ne proposent pour la plupart d’entre eux rien de sérieux pour en sortir. Mais on les invite encore. Pour ma part, je n’étais pas convié sur les plateaux de télévision quand j’annonçais, et j’écrivais, il y a plus de dix ans, qu’une crise majeure accompagnée d’un chômage incontrôlé allait bientôt se produire, je fais partie de ceux qui n’ont pas été admis à expliquer aux Français ce que sont les origines réelles de la crise alors qu’ils ont été dépossédés de tout pouvoir réel sur leur propre monnaie, au profit des banquiers. Par le passé, j’ai fait transmettre à certaines émissions économiques auxquelles j’assistais en téléspectateur le message que j’étais disposé à venir parler de ce que sont progressivement devenues les banques actuelles, le rôle véritablement dangereux des traders, et pourquoi certaines vérités ne sont pas dites à leur sujet. Aucune réponse, même négative, n’est venue d’aucune chaîne de télévision et ce durant des années.

Cette attitude répétée soulève un problème concernant les grands médias en France : certains experts y sont autorisés et d’autres, interdits. Bien que je sois un expert internationalement reconnu sur les crises économiques, notamment celles de 1929 ou de 1987, ma situation présente peut donc se résumer de la manière suivante : je suis un téléspectateur. Un prix Nobel… téléspectateur, Je me retrouve face à ce qu’affirment les spécialistes régulièrement invités, quant à eux, sur les plateaux de télévision, tels que certains universitaires ou des analystes financiers qui garantissent bien comprendre ce qui se passe et savoir ce qu’il faut faire. Alors qu’en réalité ils ne comprennent rien. Leur situation rejoint celle que j’avais constatée lorsque je m’étais rendu en 1933 aux États-Unis, avec l’objectif d’étudier la crise qui y sévissait, son chômage et ses sans-abri : il y régnait une incompréhension intellectuelle totale. Aujourd’hui également, ces experts se trompent dans leurs explications. Certains se trompent doublement en ignorant leur ignorance, mais d’autres, qui la connaissent et pourtant la dissimulent, trompent ainsi les Français.

Cette ignorance et surtout la volonté de la cacher grâce à certains médias dénotent un pourrissement du débat et de l’intelligence, par le fait d’intérêts particuliers souvent liés à l’argent. Des intérêts qui souhaitent que l’ordre économique actuel, qui fonctionne à leur avantage, perdure tel qu’il est. Parmi eux se trouvent en particulier les multinationales qui sont les principales bénéficiaires, avec les milieux boursiers et bancaires, d’un mécanisme économique qui les enrichit, tandis qu’il appauvrit la majorité de la population française mais aussi mondiale.

Question clé : quelle est la liberté véritable des grands médias ? Je parle de leur liberté par rapport au monde de la finance tout autant qu’aux sphères de la politique.

Deuxième question : qui détient de la sorte le pouvoir de décider qu’un expert est ou non autorisé à exprimer un libre commentaire dans la presse ?

Dernière question : pourquoi les causes de la crise telles qu’elles sont présentées aux Français par ces personnalités invitées sont-elles souvent le signe d’une profonde incompréhension de la réalité économique ? S’agit-il seulement de leur part d’ignorance ? C’est possible pour un certain nombre d’entre eux, mais pas pour tous. Ceux qui détiennent ce pouvoir de décision nous laissent le choix entre écouter des ignorants ou des trompeurs.

Maurice Allais.

Présentation par Marianne

Le Prix Nobel iconoclaste et bâillonné

La « Lettre aux Français » que le seul et unique prix Nobel d’économie français a rédigée pour Marianne aura-t-elle plus d’écho que ses précédentes interventions ? Il annonce que le chômage va continuer à croître en Europe, aux États-Unis et dans le monde développé. Il dénonce la myopie de la plupart des responsables économiques et politiques sur la crise financière et bancaire qui n’est, selon lui, que le symptôme spectaculaire d’une crise économique plus profonde : la déréglementation de la concurrence sur le marché mondial de la main-d’œuvre. Depuis deux décennies, cet économiste libéral n’a cessé d’alerter les décideurs, et la grande crise, il l’avait clairement annoncée il y a plus de dix ans.

Éternel casse-pieds

Mais qui connaît Maurice Allais, à part ceux qui ont tout fait pour le faire taire ? On savait que la pensée unique n’avait jamais été aussi hégémonique qu’en économie, la gauche elle-même ayant fini par céder à la vulgate néolibérale. On savait le sort qu’elle réserve à ceux qui ne pensent pas en troupeau. Mais, avec le cas Allais, on mesure la capacité d’étouffement d’une élite habitée par cette idéologie, au point d’ostraciser un prix Nobel devenu maudit parce qu’il a toujours été plus soucieux des faits que des cases où il faut savoir se blottir.

« La réalité que l’on peut constater a toujours primé pour moi. Mon existence a été dominée par le désir de comprendre ce qui se passe, en économie comme en physique ». Car Maurice Allais est un physicien venu à l’économie à la vue des effets inouïs de la crise de 1929. Dès sa sortie de Polytechnique, en 1933, il part aux États-Unis. « C’était la misère sociale, mais aussi intellectuelle : personne ne comprenait ce qui était arrivé. » Misère à laquelle est sensible le jeune Allais, qui avait réussi à en sortir grâce à une institutrice qui le poussa aux études : fils d’une vendeuse veuve de guerre, il a, toute sa jeunesse, installé chaque soir un lit pliant pour dormir dans un couloir. Ce voyage américain le décide à se consacrer à l’économie, sans jamais abandonner une carrière parallèle de physicien reconnu pour ses travaux sur la gravitation. Il devient le chef de file de la recherche française en économétrie, spécialiste de l’analyse des marchés, de la dynamique monétaire et du risque financier. Il rédige, pendant la guerre, une théorie de l’économie pure qu’il ne publiera que quarante ans plus lard et qui lui vaudra le prix Nobel d’économie en 1988. Mais les journalistes japonais sont plus nombreux que leurs homologues français à la remise du prix : il est déjà considéré comme un vieux libéral ringardisé par la mode néolibérale.

Car, s’il croit à l’efficacité du marché, c’est à condition de le « corriger par une redistribution sociale des revenus illégitimes ». Il a refusé de faire partie du club des libéraux fondé par Friedrich von Hayek et Milton Friedman : ils accordaient, selon lui, trop d’importance au droit de propriété… « Toute ma vie d’économiste, j’ai vérifié la justesse de Lacordaire : entre le fort et le faible, c’est la liberté qui opprime et la règle qui libère”, précise Maurice Allais, dont Raymond Aron avait bien résumé la position : « Convaincre des socialistes que le vrai libéral ne désire pas moins qu’eux la justice sociale, et des libéraux que l’efficacité de l’économie de marché ne suffit plus à garantir une répartition acceptable des revenus. » Il ne convaincra ni les uns ni les autres, se disant « libéral et socialiste ».

Éternel casse-pieds inclassable. Il aura démontré la faillite économique soviétique en décryptant le trucage de ses statistiques. Favorable à l’indépendance de l’Algérie, il se mobilise en faveur des harkis au point de risquer l’internement administratif. Privé de la chaire d’économie de Polytechnique car trop dirigiste, « je n’ai jamais été invité à l’ENA, j’ai affronté des haines incroyables ! » Après son Nobel, il continue en dénonçant « la chienlit laisser-fairiste » du néolibéralisme triomphant. Seul moyen d’expression : ses chroniques touffues publiées dans le Figaro, où le protège Alain Peyrefitte. À la mort de ce dernier, en 1999, il est congédié comme un malpropre.

Il vient de publier une tribune alarmiste dénonçant une finance de « casino» : « L’économie mondiale tout entière repose aujourd’hui sur de gigantesques pyramides de dettes, prenant appui les unes sur les autres dans un équilibre fragile, jamais dans le passé une pareille accumulation de promesses de payer ne s’était constatée. Jamais, sans doute, il est devenu plus difficile d’y faire face, jamais, sans doute, une telle instabilité potentielle n’était apparue avec une telle menace d’un effondrement général. » Propos développés l’année suivante dans un petit ouvrage très lisible* qui annonce l’effondrement financier dix ans à l’avance. Ses recommandations en faveur d’un protectionnisme européen, reprises par Chevènement et Le Pen, lui valurent d’être assimilé au diable par les gazettes bien-pensantes. En 2005, lors de la campagne sur le référendum européen, le prix Nobel veut publier une tribune expliquant comment Bruxelles, reniant le marché commun en abandonnant la préférence communautaire, a brisé sa croissance économique et détruit ses emplois, livrant l’Europe au dépeçage industriel : elle est refusée partout, seule l’Humanité accepte de la publier…

Aujourd’hui, à 98 ans, le vieux savant pensait que sa clairvoyance serait au moins reconnue. Non, silence total, à la notable exception du bel hommage que lui a rendu Pierre-Antoine Delhommais dans le Monde. Les autres continuent de tourner en rond, enfermés dans leur « cercle de la raison » •

Éric Conan

* La Crise mondiale aujourd’hui, éditions Clément Juglar, 1999.

Source : Marianne, n°659, décembre 2009.

Philippe Aghion – Économie des institutions, de l’innovation et de la croissance

Leçon inaugurale le 1er octobre 2015 à 18h00 « Les énigmes de la croissance »

Sa fiche Wikipedia nous apprend qu’il s’intéresse à la situation de la France :

L’économiste Philippe Aghion est nommé au Collège de France, titulaire de la chaire Économie des institutions, de l’innovation et de la croissance.

Après 15 années passées à Harvard, Philippe Aghion est nommé au Collège de France, titulaire de la chaire Économie des institutions, de l’innovation et de la croissance, avec un grand projet : la création d’un centre de recherche, de réflexion et d’échanges autour de l’économie de la croissance et de l’innovation. Les travaux de Philippe Aghion, et notamment sa nouvelle théorie « Schumpetérienne » de la croissance, ont largement participé à renouveler un domaine qui s’est considérablement transformé au cours des 25 dernières années. Faisant fi des segmentations habituelles, il a contribué à une compréhension plus articulée des mécanismes économiques, mêlant macro et micro-économie, théorie et analyse empirique, étude du comportement des acteurs et analyse des systèmes, appréhension globale des mécanismes de la croissance et du développement ainsi que de leurs liens à l’innovation. Repenser la croissance économique « Mes travaux de recherche se situent depuis 30 ans à l’intersection de la macroéconomie de la croissance et de la microéconomie des marchés, des contrats et des organisations. Mon but a été de développer une nouvelle théorie de la croissance dotée de solides fondements microéconomiques afin : 1/ de mieux comprendre le lien entre croissance et fonctionnement des marchés, entre croissance et organisations internes des entreprises, entre croissance et institutions économique et politiques ; 2 / de penser la notion de politique de croissance et de pouvoir formuler des recommandations qui soient adaptées au contexte institutionnel et au niveau de développement technologique du pays ou de la région concernée », explique Philippe Aghion. « Je me soumets en permanence au test des données et à l’épreuve des chiffres. Faire dialoguer sans cesse théorie et analyses empiriques permet d’affiner les modèles, de mieux comprendre la complexité des interactions, de lutter contre les fausses croyances et donc de sortir de l’idéologie », précise-t-il, plaçant résolument l’économie du côté de la science. Philippe Aghion est également reconnu pour des contributions majeures dans les domaines de l’organisation industrielle, de la théorie des institutions ou de l’économie politique, questionnant par exemple le lien entre dynamique économique et dynamique des institutions. Inventer un nouveau type de croissance fondée sur l’innovation L’arrivée de Philippe Aghion au Collège de France sera marquée par la création et le développement d’un important pôle de recherche économique : Le Centre pour l’Innovation et la croissance. Développer des banques de données économiques internationales ; fédérer les grands pôles français de recherche en économie ; devenir une place centrale permettant de réunir les universitaires qui travaillent sur différents aspects de l’innovation, les praticiens du monde de l’entreprise, les Français de la Silicon Valley ou de Boston ou encore les politiques : sont quelques-uns des objectifs de ce centre

« Déclencher l’innovation est vital pour nos sociétés. En analyser les mécanismes et confronter la recherche pure à l’économie réelle permettra de dépasser les approches empiriques et de donner aux acteurs politiques et économiques les outils nécessaires à l’invention d’un nouveau type de croissance fondée sur l’innovation », explique Philippe Aghion. « Ce centre sera largement ouvert aux jeunes chercheurs. J’aimerais qu’il soit également un moyen de changer la manière de penser l’économie à travers l’éducation. Nous mènerons donc des actions en direction des professeurs, des relais d’opinion ou encore des lycéens. Les jeunes sont ma propre destruction créatrice, affirme Philippe Aghion, en référence à Schumpeter. Les cours de Philippe Aghion pour l’année 2015/2016 auront lieu les mardis à partir du 6 octobre sur le thème Théorie et politiques de la croissance. Il donnera sa leçon inaugurale, Les énigmes de la croissance, le 1er octobre à 18h00. Un colloque, Innovation, inégalités et croissance, aura lieu les 13 et 14 juin 2016. L’ensemble de son enseignement sera disponible sur www.collegedefrance.fr en français et en anglais.

 

« Les énigmes de la Croissance » Leçon inaugurale du Pr Philippe Aghion – Le jeudi 1er octobre 2015 à 18h00 – Lors de sa leçon inaugurale, Philippe Aghion entend faire partager la « formidable aventure intellectuelle » qu’a été pour lui l’élaboration d’une nouvelle théorie Schumpetérienne de la croissance, ainsi que les profonds bouleversements opérés dans l’approche et les manières de travailler : « L’histoire d’une profonde transformation de l’objet et du sujet », où modélisation et analyse empirique sont dorénavant mises en dialogue constant. Il reviendra sur le cheminement et les raisons qui l’ont amené, avec d’autres économistes, à reconsidérer les théories de la croissance « qui apparaissaient insuffisantes tant sur le plan théorique que d’un point de vue empirique » et à approfondir les intuitions Schumpetérienne, notamment en ce qui concerne la place centrale de l’innovation comme moteur de croissance et le concept de « destruction créatrice ». « Ce dialogue entre une théorie Schumpetérienne de la croissance en cours d’élaboration et une nouvelle économétrie de la croissance plus microéconomique qu’auparavant parce que d’avantage centrée sur les entreprises et les secteurs, a permis : (i) d’affiner notre modèle Schumpetérien et d’en éliminer les hypothèses ou aspects « contrefactuels » ; (ii) d’éclairer plusieurs énigmes de la croissance ; (iii) de réfléchir de façon plus systématique aux politiques de croissance ». Philippe Aghion exposera par exemple le cheminement opéré autour de trois grandes idées Schumpetériennes : « La croissance de long-terme résulte de l’innovation » ; « L’innovation ne tombe pas du ciel, elle est un processus social » ; « Les nouvelles innovations rendent les innovations antérieures obsolètes. Ce que Schumpeter appelle – la destruction créatrice – ». À travers des exemples – comme celui du rapport entre innovation, inégalités, et mobilité sociale – , il reviendra sur la manière dont «l’approche Schumpétérienne et le dialogue entre théorie et analyse empirique que cette approche rend possible, permettent ensemble d’éclairer certains mystères, de résoudre certaines « énigmes » de la croissance ». Philippe Aghion abordera par ailleurs la question du positionnement du chercheur en économie, de son engagement ou non dans les débats de politique économique, sachant que pour lui politiques et interventions publiques sont quoiqu’il en soit « des variables instrumentales » à analyser pour mieux repenser les politiques de croissance. « Mieux appréhender les énigmes de la croissance, la relation entre croissance et innovations et le rôle des institutions dans le développement économique fera avancer non seulement la science mais la société dans son ensemble ».